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Colombie : Cultures à usage illicite, reprise de l’aspersion aérienne de glyphosate

Les processus d’éradication volontaire des cultures à usage illicite sont soutenus, mais marginalement en comparaison avec les opérations d’éradication forcées auxquelles le gouvernement donne la priorité. Dans le cadre de sa politique de guerre contre les drogues, Duque prétend la reprise des aspersions aériennes de glyphosate à partir de juin.

Le point 4 de l’Accord de Paix établit que les processus de substitution volontaires avec les communautés doivent être faits de façon prioritaire, conditionnant le recours à l’éradication à la force à deux cas : 1. qu’il y ait des personnes cultivatrices ne manifestant pas leur intention de substitution ou 2.  qu’ils ne respectent pas les accords acquis.

Malgré cette disposition claire de l’Accord, le gouvernement Duque a suspendu l’attachement de familles au programme de substitution volontaire. Pendant le gouvernement Santos, des accords de substitution avec 99 097 familles ont eu lieu ; Depuis que Duque assume la présidence de la république, les accords de substitution volontaires ne se sont plus proposés.

D’après les registres de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime – ONUDC, au 31 août 2020, 42 339 hectares de cultures à usage illicite avaient été éradiqués volontairement, avec un pourcentage de réensemencement de 0,2%. En novembre 2020, 107 229 hectares avaient été éradiqués de force, avec un indice de réensemencement du 30%[1].

Les communautés ont manifesté leur volonté de substituer et dans de nombreuses instances ont fait appel au gouvernement pour être admis au programme de substitution volontaire. Dans le même temps, le directeur de l’Agencia de Renovación del Territorio – ART a signalé qu’il n’y a pas des ressources suffisantes pour inclure plus de familles dans le programme[2].

En raison de cette situation, les communautés ont dû avoir recours à une action judiciaire pour freiner l’éradication forcée. En septembre 2020, des plaintes ont été portées dans 8 départements : Cauca, Nariño, Caquetá, Guaviare, Meta, Norte de Santander, Córdoba et Putumayo. Dans presque la totalité des actions judiciaires menées, les délibérés sont en faveur des communautés. Le jugement ordonne au gouvernement de respecter l’Accord de Paix et le somme d’établir des accords de substitution volontaire.

Nonobstant, le gouvernement continue à préférer la méthode d’éradication  forcée. Début avril, le décret régulant l’aspersion aérienne au glyphosate a été promulgué et les autorités se préparent pour reprendre les aspersions en juin.

L’aspersion aérienne avec le glyphosate est une pratique en suspens en Colombie depuis 2015 dû aux méfaits sur la santé. En 2017, la Cour constitutionnelle a conditionné la reprise de ces activités au respect de 6 exigences sanitaires environnementales.

Pour prendre en compte les conditions imposées par le Haut tribunal, le 12 avril dernier un décret régulant l’aspersion aérienne avec le glyphosate a été promulgué. De même, l’Autoridad Nacional de Licencias Ambientales – ANLA a approuvé la modification du Plan de gestion environnementale du Programme d’éradication par l’aspersion aérienne de glyphosate – PECIG, en espagnol.

Les communautés indigènes, paysannes et les organisations sociales ont remis à la Cour constitutionnelle une pétition demandant la consultation préalable dans les territoires quant à l’aspersion avec du glyphosate. Ils ont aussi exigé la prise en compte des délibérés existants et des recommandations des organisations internationales qui s’opposent à l’utilisation de l’herbicide.

Face à la décision de reprendre l’aspersion aérienne du glyphosate, les organisations sociales ont signalé que « le gouvernement national met en miette l’Accord de Paix et piétine la confiance des communautés ayant accompli ce qui a été entendu entre elles et le gouvernement. Malgré les manquements de la part du gouvernement et le fait que des 99 907 familles qui se sont souscrites aux accords de substitution volontaire, seulement 67 665 ont été aidées, les familles continuent de manifester leur volonté de s’inscrire au programme de substitution volontaire. Elles n’ont toujours pas été entendues, en revanche, elles sont victimes de la terreur de la force publique »[3]

En septembre 2020, le gouvernement des Etats Unis a certifié la Colombie dans sa lutte contre les drogues. Le mémorandum de certification coïncide avec ce qui a été établit dans le « Plan Quinquenal » signé par les deux pays, ayant comme objectif la réduction des cultures de coca à sa moitié dans 5 années. En fait, il signale que pour accomplir ce but, la Colombie doit avancer dans la reprise de l’éradication aérienne des cultures à usage illicite[4].

Photo: Ministerio Defensa


[1]UNUDC (2020). Informe Ejecutivo PNIS No. 22. Monitoreo a la implementación del Plan de Atención inmediata – componente familiar. Consulté sur : 31 août 2020. Disponible sur : https://www.unodc.org/documents/colombia/2020/Octubre/Informe_Ejecutivo_No._22.pdf

[2]El Nuevo Siglo (2021) “No es posible ampliar el programa de sustitución de cultivos” Disponible sur : https://www.elnuevosiglo.com.co/articulos/04-16-2021-no-es-posible-ampliar-el-programa-de-sustitucion-de-cultivos-con-este-modelo

[3]Coordinadora Nacional de Cultivadores de Coca, Amapola y Marihuana – COCCAM (2021) Rechazo a la reanudación de fumigación con glifosato

[4]Secretaría Técnica del Componente Internacional de Verificación CINEP/PPP-CERAC (2021) Octavo Informe de verificación de la implementación del Acuerdo Final de Paz en Colombia. Disponible sur :  https://www.cinep.org.co/Home2/component/k2/864-octavo-informe-de-verificacion-de-la-implementacion-del-acuerdo-final-de-paz-en-colombia.html