ECVC: Recommandations Politiques pour les Élections Européennes

Article originellement publié sur la page de la Coordination Européenne Via Campesina.


Recommandations Politiques d’ECVC pour les Élections Parlementaires Européennes de Juin 2024 et la Législature Suivante

La neuvième législature du Parlement européen a commencé en 2019 dans une atmosphère d’espoir et de hautes ambitions. L’avènement du Pacte Vert et de sa Stratégie de la ferme à la table, et notamment de leurs objectifs, semblaient contenir la promesse d’une évolution vers des systèmes alimentaires durables.

Cependant, au cours des deux dernières années, ces politiques ont été dépouillées de toute ambition et de tout contenu substantiel dans un contexte d’incertitude et de peur. La situation politique mondiale et les politiques publiques européennes ont été ébranlées par la guerre, les catastrophes climatiques et les crises sociales, sanitaires et économiques, caractérisées par un discours politique de plus en plus simpliste, populiste et polarisé conduisant à la montée de l’extrême droite dans de nombreux pays. A cela s’ajoute la pression des institutions européennes envers de fausses solutions telles que l’agriculture carbonée ou les OGM. Il s’agit de se demander si l’UE sert les intérêts des citoyens et citoyennes, ou des entreprises.

Les agriculteurs et agricultrices de l’UE sont dans la rue depuis janvier 2024 pour réclamer des prix équitables, la fin des accords de libre-échange, une PAC plus juste et la réduction des charges administratives. Ce manifeste est publié au milieu des propositions et des votes de l’UE et il n’est donc pas possible d’en tirer des conclusions rapides. Toutefois, les éléments relatifs à la chaîne de valeur sont prometteurs et doivent être transformés en actions concrètes. Les éléments relatifs à la simplification de la bureaucratie ne peuvent être mis en œuvre sans relever les grands défis climatiques et environnementaux de notre époque. Là encore, il est essentiel de veiller à ce que les intérêts des agriculteur.rice.s et des citoyen.ne.s soient prioritaires.

L’impact sur l’agriculture et l’alimentation a été considérable alors que le contexte est déjà incertain. L’Europe compte aujourd’hui environ 9 millions de fermes, alors qu’elle en comptait 15 millions en 2003, l’âge moyen des paysans et paysannes est de 57 ans. Celles et ceux-là luttent pour accéder aux semences, à la terre, à l’eau et au marché. Les politiques publiques donnent la priorité aux intérêts des marchés et aux profits des entreprises plutôt qu’aux Droits Humains et à l’alimentation de la population.

Les limites du système actuel, du développement de l’industrialisation de l’agriculture notamment en élevage, et des mécanismes de subventions trompeurs de la PAC, sont de plus en plus évidentes. La biodiversité s’effondre, les sols s’appauvrissent, le changement climatique s’accélère et les paysannes et paysans sont les premiers à en payer le prix.

Pourtant, face à tout cela, les paysan.ne.s continuent d’apporter des solutions et de l’espoir aux populations. Ils continuent de cultiver concrètement un modèle agricole alternatif, plus résilient, basé sur la souveraineté alimentaire et l’agroécologie paysanne. Ce modèle est capable de nourrir toutes les citoyens et citoyennes, grâce à une approche sociale qui permet de faire face aux multiples crises systémiques et est le mieux adapté aux réalités uniques de chaque territoire européen.

Ce type d’agriculture à petite échelle n’est possible qu’avec un grand nombre de fermes et de bonnes conditions de vie et de travail pour les paysan.ne.s et les travailleurs et travailleuses agricoles dans toute l’Europe. Les politiques doivent soutenir les agriculteurs et agricultrices actuelles et leur permettre de passer à des modèles durables. Ces politiques doivent encourager le renouvellement générationnel afin que plus de personnes et plus de jeunes puissent se lancer dans la profession. 

Il est nécessaire de construire des ponts de solidarité et de compréhension entre les zones urbaines et rurales et de déconstruire la rhétorique polarisante actuelle. Nous devons faire preuve de solidarité avec le reste du monde et aborder la question d’un commerce agricole international plus juste.

Dans un contexte de soulèvement agricole traversant toute l’Europe, et alors que les demandes pour des prix et des marchés agricoles plus justes et de meilleures conditions de travail s’affirment clairement, les élections européennes de juin 2024 doivent permettre à nos décideurs d’organiser une transition des systèmes agricoles et alimentaires fondée sur cette vision de la souveraineté alimentaire.