Stop! La CCNUCC déraille!

Appel à la mobilisation pour Copenhague, Décembre 2009

Ne faisons pas entrer l'agriculture paysanne dans le  marché  des droits à polluer! 

Tandis que les prédictions des scientifiques sur la catastrophe climatique vont grandissantes, les grands de ce monde vont se réunir à Copenhague en Décembre 2009 – du 7 au 18 Décembre – pour la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique (CCNUCC). Les solutions débattues par la CCNUCC continuent d'autoriser les grands consommateurs d'énergie à polluer sans impunité à partir du moment où ils payent pour que d'autres mettent en œuvre des projets de capture du carbone. Le protocole de Kyoto et les mécanismes de marché qu'il met en place n'ont pas réussi  à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à ralentir les changements du climat (1)

Malgré l'urgence de la situation, il est clair que cette convention ne remet pas en question le modèle actuel de consommation et de production basé sur l'illusion d'une croissance continue. Au contraire, ils ont inventé de nouvelles opportunités de business pour le secteur privé afin que celui-ci puisse continuer à faire d’énormes profits au détriment de la planète. Le Carbone est devenu une nouvelle marchandise privatisable aux mains des spéculateurs de tous poils. Ils l'utilisent comme un nouveau produit de l'économie virtuelle, qui a engendré la crise actuelle.  

L'agriculture est désormais au centre des négociations sur le climat. D'après les statistiques, pour la période 1990 – 2005, les pratiques agricoles contribuaient  pour 17% aux émissions globales. De plus, la pression grandissante sur les terres agricoles va devenir l’une des principales causes  de la déforestation, contribuant ainsi fortement à la production de gaz à effet de serre (2). En réalité, la destruction de la forêt et la dégradation de l'environnement par le secteur agricole proviennent essentiellement de l'agriculture industrielle. Les grandes entreprises agricoles et les monocultures à perte de vue font un usage intensif des engrais chimiques issus de la pétrochimie, des pesticides et des machines. Ils convertissent les forêts et les prairies riches en carbone en déserts verts. Ces modes de production s'appuient sur tout un processus long et inutile  de transformation secondaire et génèrent de multiples transports.  

Par ailleurs, l'agriculture familiale durable à petite échelle est la solution au changement climatique. Elle contribue au refroidissement de la planète et joue un rôle vital dans la relocalisation des économies nous donnant ainsi l'opportunité de vivre dans une société plus durable. La production locale et durable d'aliments consomme moins d'énergie, ne dépend pas de l'importation d'aliments pour animaux. Elle capture le carbone dans le sol tout en augmentant la biodiversité. Les semences locales sont mieux adaptées aux changements du climat qui nous affectent déjà. Non seulement l'agriculture familiale améliore le bilan carbone de la planète mais elle emploie aussi à travers le monde 2,8 milliards de personnes (3) – hommes et femmes. Elle reste aussi la meilleure manière de combattre la faim, la malnutrition, et la crise alimentaire actuelle. Pour que les petits paysans puissent continuer à nourrir le monde et à protéger la planète, on doit leur donner accès à la terre, à l'eau, à l'éducation, et à la santé, avec le soutien de  politiques en faveur de la souveraineté alimentaire.  

Pour les paysans du monde, les fausses solutions avancées dans les négociations climatiques, telle que l'initiative REDD (Réduction des Émissions provenant de la Déforestation et de la Dégradation des forêts), les mécanismes de marché du carbone, les projets de géo-ingénierie, sont aussi menaçantes que la sécheresse, les tornades, et les nouvelles tendances du climat. D'autres propositions telles que l'initiative Biochar, le semis direct et des OGM résistants à la sécheresse sont des propositions de l'agrobusiness qui ne feront que marginaliser davantage les petits paysans. La promotion massive des plantations industrielles et des monocultures d'agrocarburants, présentée comme une solution à la crise, augmente en réalité la pression sur les terres cultivables. Cette logique a déjà conduit à l'accaparement massif de terres par les multinationales dans les pays en voie de développement, provoquant l'expulsion des paysans et des communautés indigènes hors de leur territoire.  

Il est injuste de se servir des bénéfices que les petits paysans apportent à l'environnement comme excuse pour continuer à polluer. La CCNUCC est en ce moment en train de discuter de mécanismes visant à inclure les terres agricoles dans les schémas de commerce du carbone.  Une telle manoeuvre pourrait laisser les agriculteurs sans aucun autre soutien que l'argent sale  provenant de polleurs. Ces mécanismes sont voués à l'échec parce qu'ils ne visent pas la réduction de l'utilisation des ressources fossiles ni la réduction des émissions dans les pays industrialisés.  

En Conséquence, la Via Campesina appelle tous ses membres, amis et alliés à se mobiliser à Copenhague et partout dans le monde pendant la conférence de la CCNUCC en décembre 2009. Une journée spéciale d'action sur l'agriculture sera définie pour s'intégrer aux manifestations de masse organisées par des centaines de mouvements sociaux et d'organisations.  
 

En ce qui concerne Copenhague : voici ce que pouvez faire dans chacun de vos pays et localement.

  1. Collecte de données et d’informations illustrant l'impact du changement climatique sur l'agriculture paysanne et les moyens d'existence des petits paysans.
  2. Collecte de données et d’informations illustrant l'impact sur les petits paysans des fausses solutions basées sur le marché pour répondre au changement climatique
  3. Faire remonter du terrain des informations sur la manière dont l'agriculture paysanne protège les écosystèmes.
  4. Persuader votre gouvernement de rejeter les solutions basées sur le marché et favorables au profit pour promouvoir au contraire de véritables solutions à la crise actuelle. Protéger l'agriculture durable à petite échelle et la souveraineté alimentaire font partie de telles solutions.
  5. Rejoindre la mobilisation! Ensemble avec d'autres mouvements sociaux, nous participerons à de nombreuses activités en septembre à Bangkok lors de la dernière réunion de préparation de la CCNUCC avant Copenhague.

Nous rejetons les fausses solutions business de la CCNUCC! 

Nous demandons une réorientation urgente de l'économie mondiale dans l'intérêt des peuples   – une économie où l'agriculture paysanne et les systèmes de production locaux d'aliments jouent un rôle central.  

Les peuples et la planète passent avant le profit quel qu'il soit!   

Ne faisons pas de business d'une catastrophe environnementale! 

L'agriculture paysanne à petite échelle et la souveraineté  alimentaire contribuent à refroidir la planète!  
 


1. Voilà ce que dit Peter Atherton du Citigroup qui a été très largement impliqué  dans le commerce du carbone au sujet du plus grand marché du carbone du monde : «  le schéma européen d'émissions n'a aucunement inversé les courbes d'émissions…Les objectifs politiques ont-ils été atteints? Prix en hausse, émissions en hausse, profits en hausse…donc non, pas vraiment ». (Citigroup Global markets (2007), cité dans L. Lohmann « Gouvernance ou corruption », présentation Athènes, Novembre 2008. www.thecornerhouse.org.uk/pdf/document/ATHENS%2010.pdf

2.  D'après Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la CCNUCC, 14 Mai 2009

3. Le Monde, 23 avril 2009