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Nyéléni a fêté ses 10 ans au Mali

(Selingué, le 1er octobre 2017) Il y a 10 ans, nous étions ici pour le Forum mondial sur la souveraineté alimentaire – Nyéléni 2007 – qui avait rassemblé les mouvements sociaux et les organisations paysannes dont La Via Campesina, les Amis de la Terre International, La Marche Mondiale des Femmes, les pêcheurs, les éleveurs, les peuples autochtones, le Comité International de Planification pour la Souveraineté Alimentaire… venus des 5 continents. Nous avions adopté la Déclaration de Nyéléni qui définit la souveraineté alimentaire comme le droit des peuples à une alimentation saine et culturellement appropriée produite avec des méthodes écologiques et responsables et le droit des peuples de définir leurs propres systèmes agricoles et alimentaires. Cette déclaration nourrit les 6 piliers de la souveraineté alimentaire, lesquels garantissent les droits des paysannes et des paysans qui sont : le droit à l’alimentation, le droit d’utiliser et de gérer les terres et les territoires, les eaux, les semences, le bétail et la biodiversité. Ceci rester entre les mains de celles et ceux qui produisent la nourriture à travers l’agroécologie, basée sur les savoirs des paysannes et des paysans. C’est de là que la souveraineté alimentaire s’est développée dans de nombreux pays partout dans le monde, depuis nos communautés et nos territoires jusque dans les politiques et législations comme au Brésil, au Népal, au Venezuela, en Bolivie, en Equateur, à la CEDEAO, au Sénégal, au Mali…

Depuis 2008, les crises – financière, écologique, technologique, alimentaire – ont accéléré les accaparements des terres et de l’eau, le développement de la biotechnologie avec les OGM et les nouveaux OGM – et de fait la privatisation du vivant par une poignée de multinationales, les violences contre les communautés et la criminalisation des paysannes et des paysans, ainsi que l’avancée du système industriel agroalimentaire qui est à l’origine du changement climatique qui nous affecte. Dans ce centre Nyéléni, actuellement reconnu comme Centre international de Formation en Agroécologie paysanne (CIFAN) et géré par la CNOP (la Coordination Nationale des Organisations Paysannes du Mali), nous avons eu de grands forums internationaux : les espaces citoyens d’interpellation démocratique sur la gouvernance de la recherche pour l’agriculture et l’alimentation en 2010, contre l’Accaparement des terres en novembre 2011, sur l’agroécologie paysanne en février 2015 et nous avons organisé nos luttes en donnant naissance à la Convergence Globale des Luttes pour la Terre et l’Eau de l’Afrique de l’Ouest en juin 2015 pour continuer, en synergie, à porter la souveraineté alimentaire.

Aujourd’hui, nous sommes ici plus de 250 participantes et participants venu‐e‐s de 24 pays des 5 continents pour faire le bilan des 10 ans de luttes pour la souveraineté alimentaire et affirmer l’Agroécologie paysanne comme stratégie pour sa réalisation. Nous avons réaffirmé haut et fort notre engagement à soutenir la Déclaration des droits des paysans et autres travailleurs vivant dans les zones rurales, en cours de négociation aux Nations Unies. Nous avons discuté de comment:

1) Garantir la sécurisation de la terre, de l’eau et des autres ressources naturelles ;

2) Sauvegarder, gérer et valoriser la biodiversité des semences paysannes et des races locales ;

3) Encourager les pratiques en agroécologie paysanne : diversité, complémentarité, adaptabilité ;

4) Promouvoir les systèmes alimentaires locaux diversifiés, nutritionnels et thérapeutiques ;

5) Appuyer et valoriser la place des femmes et des jeunes ;

6) Renforcer les synergies et alliances et aussi l’organisation collective ;

7) Agir au niveau institutionnel, législatif et règlementaire.

Ces 7 points sont les piliers du « manifeste de l’agroécologie paysanne de Nyéléni » que nous avons adopté et qui sera notre guide pour gagner la souveraineté alimentaire.

C’est le moment de rappeler que Nyéléni, fille unique, était une jeune paysanne valeureuse qui a travaillé pour nourrir les siens. Elle est un exemple pour les communautés paysannes, les femmes et les jeunes présents aujourd’hui, déjà très engagés à travers la formation et qui vont continuer à relever le défi pour réaliser la souveraineté alimentaire et les droits des paysannes et des paysans, en s’appuyant sur les recommandations de nos travaux planifiées pour 10 ans et que nous nous engageons à accomplir de retour dans nos pays.

Nous invitons les chercheurs et les universitaires ainsi que les décideurs politiques à nous rejoindre pour combattre les fausses solutions des multinationales et pour promouvoir l’agroécologie paysanne comme la voie de la souveraineté alimentaire.

Fait au CIFAN, Le 01 Octobre 2017