Les dispositions de l’OMC à Genève : Une véritable rupture ou le business-as-Usual ?

Genève | 17 juin 2022 | Premières réactions de La Via Campesina aux résultats du MC12 de l’OMC


Contrairement aux déclarations publiques de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) – les dirigeant.es paysan.nes de La Via Campesina, qui sont à Genève cette semaine pour se mobiliser contre la 12ème réunion ministérielle, insistent sur le fait que l’organisme commercial n’apporte aucune réponse sur les questions les plus urgentes auxquelles sont confrontés les petit.es producteur.trices alimentaires ruraux et urbains du monde entier. Les résultats de la réunion ministérielle sont à la fois alarmants et décevants. Le compromis fait à Genève ne répond pas aux multiples crises telles que l’inflation, la hausse des prix, la faim et le réchauffement climatique.

Nos allié.es et les membres de la société civile qui ont suivi les négociations de l’intérieur nous ont informés que le processus menant à la déclaration publiée le dernier (et le plus long) jour de la réunion ministérielle était opaque et honteux. Le texte final aurait été fourni à la dernière minute, ne laissant aucune chance aux délégations diplomatiques nationales de fournir des commentaires ou des contributions de fond.

Depuis près de neuf ans, l’OMC traîne les pieds sur la question des “stocks publics à des fins de sécurité alimentaire”. Malgré les pressions exercées par plusieurs pays en développement, l’organe commercial n’a pas pris de décision à ce sujet lors de la 12e réunion ministérielle. Il est également décevant de constater qu’en dépit de la rhétorique publique, les pays en développement qui avaient des propositions concrètes à faire à cet égard ont relâché la pression le dernier jour dans ce qui semble être une tentative de sauver l’institution d’un démantèlement définitif.

Pire, les pays ont signé une déclaration qui “se résout à renforcer le système commercial multilatéral actuel avec l’OMC à sa tête.

Trois décennies de pression abusive de l’OMC en faveur de la déréglementation, de la privatisation et des politiques de marché libre ont anéanti les économies rurales, les marchés paysans locaux et la souveraineté alimentaire de nos territoires. Pourtant, les nations membres insistent pour continuer à faire comme si de rien n’était, avec l’OMC au centre !

En fait, les perturbations et le chaos créés par la pandémie et les guerres n’ont fait que rendre plus évidente la nécessité de la souveraineté alimentaire dans nos territoires. Le compromis fait à Genève par l’OMC n’offre rien à cet égard ; au lieu de cela, il répète la rhétorique consistant à considérer toute forme d’intervention de l’État en faveur des paysan.nes comme ” source de distorsion pour le commerce mondial “.

Le changement climatique, qui constitue à ce stade une crise existentielle pour toutes les formes de vie et qui n’a fait qu’être aggravé par les exploitations agricoles industrielles et les chaînes d’approvisionnement alimentaire industrielles, trouve une mention timide dans le dernier paragraphe de la déclaration générale de l’OMC.

Alors, quelle est exactement l’avancée ici ? Apparemment aucune.

Dans les jours à venir, La Via Campesina publiera une analyse détaillée pour prouver que le compromis fait à Genève par l’OMC en 2022, présenté comme un succès historique, n’est qu’une tentative pour sauver l’Organisation Mondiale du Commerce de l’extinction. Nous appelons nos membres et allié.es à rester attentifs à l’évolution de la situation et à se méfier des titres trompeurs des médias qui visent à créer une illusion de succès.

La Via Campesina insiste sur le fait que l’OMC doit rester en dehors de toutes les questions alimentaires et agricoles. Les Etats doivent sortir de l’OMC et créer un cadre international alternatif pour l’agriculture et le commerce construit sur les principes de la Souveraineté Alimentaire et en cohérence avec la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Paysan.nes (UNDROP) et d’autres instruments de droits humains.

La Via Campesina continuera à lutter contre l’OMC et les accords de libre-échange, pour la souveraineté alimentaire et les droits des paysan.nes.

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