La Via Campesina soutient et exprime sa solidarité avec les peuples Kanak, en Nouvelle-Calédonie.
BAGNOLET, 22 JUILLET :
Face à la situation explosive en Nouvelle Calédonie, nous, paysannes et paysans de La Via Campesina, nous joignons à nos membres en France de la Confédération paysanne pour apporter notre soutien au peuple Kanak et demandons aux instances internationales de peser pour faire reconnaître les droits du peuple Kanak à l’indépendance. Nous dénonçons la politique impérialiste et d’ingérence de l’état colonial français.
Rappelons que depuis 1986, la Nouvelle Calédonie fait partie de la liste des Nations Unis des territoires non autonomes à décoloniser. Deux provinces sur 3 sont gérées par les indépendantistes et le territoire est autosuffisant sur le plan économique mais la population autochtone reste largement défavorisée contrairement aux descendants des colons, les Caldoches et aux métropolitains.
Étant le troisième producteur mondial de nickel, ce pays attire la convoitise du monde libéral capitaliste et la France a très peur de perdre la main sur le territoire qui représente aussi pour l’hexagone un grand intérêt stratégique et militaire dans le pacifique.
Face aux enjeux des ressources minières et touristiques, le développement agricole n’est pas la préoccupation des gouverneurs et la majorité des denrées agricoles est importée d’Australie. L’agriculture « marchande » aux mains des caldoches est surtout dédiée à l’élevage bovin et ne constitue que 2 % du PIB. Néanmoins, l’agriculture vivrière, consommée et échangée par les communautés, représente un quart des ressources des familles autochtones. Les productions vivrières, avec leur dimension non marchande, ont une place forte dans l’identité kanak.
Cette agriculture vivrière joue un rôle important pour la souveraineté alimentaire du peuple kanak, mais elle n’est ni reconnue, ni soutenue par les pouvoirs publics. Il est important que le processus de réforme agraire, démarrée en 1979, soit repris afin de restituer les terres privées qui ont été substituées aux kanaks et les rendre à la gestion collective du droit coutumier.
Au-delà des terres spoliées, le peuple kanak est aussi victime de discrimination et d’injustices sociales fortes à tous les niveaux, les richesses étant concentrées dans les seules mains de quelques caldoches et métropolitains. La suprématie blanche ne peut continuer à confisquer les biens, les droits, les savoirs, les coutumes d’un peuple de plus de 3000 ans. Depuis mai, la brutalité du gouvernement français à vouloir imposer un nouveau corps électoral, pour empêcher le processus des accords de Nouméa de 1998 et l’indépendance du peuple Kanak, a déjà causé la mort de 9 personnes.
Avec le passage en force de cette loi, la colère du peuple kanak s’est transformée en révolte. La seule réponse du gouvernement français a été une répression policière violente et le soutien aux milices blanches loyalistes par les forces de l’ordre. Le Haut-commissaire a même évoqué un droit à la « légitime défense », autorisant les colons les plus radicaux à s’armer.
Alors que les tensions étaient en train de s’apaiser, le 19 juin, les forces de l’ordre ont interpellé et placé en garde à vue 11 responsables politiques et syndicaux de la CCAT (Cellule de coordination des actions de terrain). Sept d’entre eux, dont le leader indépendantiste Christian Tein, ont été déportés dans des prisons françaises, à 17 000 km de chez eux, avec des chefs d’inculpation graves, relevant de la criminalité organisée.
L’État français persiste dans sa politique d’intimidation, de criminalisation du mouvement kanak et de justice à 2 vitesses, puisque les milices racistes et armées à l’origine d’exactions sur la jeunesse kanak, bénéficient, elles, d’une impunité totale. Rappelons que des élus dits loyalistes sont à l’origine de ces milices coloniales.
Nous exigeons la libération immédiate et le retour au pays des responsables kanaks et la levée de toutes les poursuites à leur encontre ainsi que de toutes les personnes victimes de répression.
Nous demandons que des enquêtes indépendantes établissent les circonstances des crimes commis. Sans reconnaissance des droits fondamentaux du peuple kanak, sans justice pour les victimes et sans équité dans le partage des richesses du territoire, la paix ne peut revenir.
Les représentant·es kanaks, eux, se disent prêts à accepter que les caldoches et autres habitant·es de l’île de longue date soient des citoyen·nes de plein droits.
Nous demandons au gouvernement français de retirer le projet de loi, de respecter les conventions internationales des droits des peuples à l’autodétermination et de réouvrir un espace de négociation avec les indépendantistes.
Vue la situation exceptionnelle en Kanaky – Nouvelle Calédonie depuis mai 2024, l’organisation, Comité Justice et Liberté pour Kanaky, a décidé de lancer une caisse de solidarité internationaliste, anticolonialiste et anticapitaliste, contre la répression actuelle en Kanaky, en coordination avec des mouvements locaux (syndicat, organisations de défense des droits) et des réseaux de solidarité en France.
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