La campagne “NON à ProSavana”: les Mozambicains en recherche de solidarité régionale
(Bulawayo, Zimbabwe, le 16 août 2014) – L’UNAC, l’Union des paysans mozambicains, membre de La Via Campesina, régionalise sa campagne “NON à ProSavana”. ProSavana est un programme agricole d’investissement considérable implanté au Mozambique qui implique également le Brésil et le Japon. Le projet a pour objectif de développer des terres agricoles en monocultures industrielles destinées à l’exportation. Cette surface d’environ 14,5 millions d’hectares se situe dans le Corridor de Nacala au Nord du Mozambique et est actuellement utilisée par des petits exploitants agricoles.
L’UNAC a participé au Sommet des Peuples de la Communauté de développement d’Afrique australe (CDAA) qui s’est tenu à Bulawayo au Zimbabwe. L’Union a vu dans ce rassemblement régional une opportunité pour promouvoir et étendre sa campagne afin d’obtenir et de forger le soutien d’autres mouvements régionaux contre le projet ProSavana.
Durant la séance plénière sur les politiques agricoles et foncières, l’UNAC a partagé ses expériences sur le projet et sur la manière dont les paysans et paysannes membres de l’organisation ont été touchés.
Nombreux sont les participants qui ont attiré l’attention sur le fait que les accaparements de terres était un phénomène affectant toutet l’Afrique australe. Ils sont même allés plus loin en affirmant que la lutte contre ProSavana ‘est non seulement une campagne nationale mais aussi régionale. Nous avons besoin du soutien de mouvements issus de l’Afrique australe ainsi que d’autres mouvements internationaux’. Ces déclarations ont fait écho à celles d’Agostinho Bento, agent des services d’assistance juridique de l’UNAC, qui a appelé à la solidarité dans la campagne contre le programme étant donné que ce dernier pourrait porter atteinte aux moyens de subsistance des paysans et des paysannes. Agostinho Bento a affirmé que malgré le déni du gouvernement mozambicain, ProSavana ‘ne se souciant pas du développement, détruira le système local de production alimentaire et les moyens de subsistance des petits paysans. Nous refusons un développement qui serait légèrement bénéfique pour viser un processus inclusif’.
L’UNAC a appelé les participants au Sommet à collaborer, pour mettre en cause le programme ProSavana et les entreprises qui saisissent les terres des communautés, en engageant des actions afin de dénoncer le projet dans tous les pays de la CDAA. Elizabeth Mpofu, du Zimbabwe Small Organic Farmers’ Forum (ZIMSOFF), a répondu à l’appel en déclarant : « nous devons être unis dans la lutte ; si nous sommes divisés, les sociétés vont tirer avantage de notre situation. C’est notre droit de résister à tout type d’oppression et de colonialisme. »
Selon l’UNAC, la campagne contre ProSavana fut un succès au niveau national. Des efforts sont en cours pour coordonner la lutte entre les organisations de société civile au Brésil et au Japon dont les gouvernements sont impliqués dans le projet en procédant à des investissements et à des expertises techniques. Toutefois, le soutien à un niveau régional est encore requis étant donné que les accaparements de terres, un phénomène en croissance dans la région CDAA, met en péril la souveraineté alimentaire, ainsi que le contrôle de de l’eau et des semences. Michelle Pressend de l’Alternative Information and Development Centre, coordinatrice du pilier d’Afrique australe de la Global Campaign to Dismantle Corporate Power a invité les participants à réfléchir sur la manière de reconstruire le combat collectif contre les entreprises au niveau régional.
En réponse à cette invitation Mme Elizabeth Mpofu du ZIMSOFF a précisé qu’« au sein de nos mouvements, il nous faudrait une consultation légale, à savoir des juristes, afin de pouvoir s’engager juridiquement dans ces actions ». Ensuite, Brid Brennan du Transnational Institute (TNI) a tiré l’attention sur le fait que les cas comme ProSavana sont des modèles mondiaux soutenus par des forteresses juridiques internationales, ce qui autorise les entreprises à saisir les terres et exporter leurs cultures aux dépens des moyens d’existence des communautés et de la souveraineté alimentaire nationale. Et d’insister : « par conséquent, il est nécessaire que nos mouvements démantèlent ces manières d’agir en collaborant avec des structures juridiques alternatives en vue de défendre les populations. »
Henk Smith du Legal Resources Centre a mis en avant les mesures légales dont nous disposons pour combattre les violations des droits des communautés, à savoir la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, élaborant le Traité du peuple à l’aide du contrôle des Sociétés Transnationales et de certains passages du Droit Coutumier. » Cela signifie toutefois que les communautés touchées doivent s’engager dans des mesures judiciaires à un niveau local.
Durant la séance plénière, certaines discussions se sont également concentrées sur les réclamations qui devaient être inclues à la déclaration soumise au chefs d’Etats de la CDAA. Ces requêtes stipulaient : le soutien à la souveraineté alimentaire ; l’appel à des mesures politiques promouvant et soutenant l’écologie agricole, les productions alimentaires locales et la reconnaissance du savoir local et indigène ; le développement d’une capacité juridique pour appuyer les mouvements locaux ; le rejet des OGM (organismes génétiquement modifiés) ; ainsi qu’une transparence et une responsabilité plus importantes de la part des gouvernements.
Visionnez la vidéo: SADC Peoples Summit – WHY ARE WE HERE? (Anglais)
Via Campesina Afrique