Déclaration De Seattle : Sortir l’agriculture de L’ OMC

Déclaration de Seattle Sortir l’agriculture de l’OMC – Vers une alternative aux politiques néo-libérales et aux institutions telles que l’OMC, Banque Mondiale (BM) et le Fonds Monétaire International (FMI).

La Via Campesina pense que nous vivons un moment historique de lutte internationale. La mobilisation massive à laquelle on a pu assister cette semaine est le résultat d’années de travail intensif de la part des mouvements sociaux et des organisations non gouvernementales. Ces actions ont conduit à une paralysie presque totale du processus de négociations de l’OMC. Un moratoire de facto a maintenant été établi. De plus, nous avons fait un saut important , par nos actions, en touchant des millions de personnes à travers les media. Nous sommes convaincus que notre résistance va continuer à s’intensifier ces prochaines années. Il s’agit d’un processus irréversible. Nous avons rencontré une forte unité parmi des mouvements sociaux très divers. Dans nos pays, nous rencontrons la répression contre nos organisations quand nous tentons de mettre en place une résistance contre des politiques injustes et criminelles. Un certain nombre de manifestants ont aussi été mis en prison à Seattle et nous protestons fortement contre cela. Le jeudi soir (2 décembre), dans une tentative désespérée de sauver la Conférence Ministérielle, les Etats-Unis et l’Union Européenne ont montré leur vrai visage : l’union contre le reste du monde. Les gouvernements des principales puissances économiques ( USA et UE) ainsi que les firmes transnationales (FTN) imposent leur agenda aux paysans et aux communautés indigènes du monde entier. Nous n’accepterons jamais cette arrogance.

Il est clair que l’agriculture et l’alimentation sont devenus une question clef et il est nécessaire de changer profondément les politiques néo-libérales et les institutions internationales telles que l’OMC, le FMI et la BM. Comme un leader du mouvement consommateur l’a dit : " manger est devenu un acte politique ". Ce à quoi la Via Campesina ajoute : "produire des produits de qualité pour notre propre population est aussi devenu un acte politique."
Les politiques néo-libérales agricoles ont mené à la destruction de nos économies paysannes et à une profonde crise dans nos sociétés, dont est menacée la véritable cohésion, qui est le droit de produire notre alimentation pour nos propres consommateurs, avec une grande diversité de produits et une consommation adaptée à nos préférences culturelles. Cela touche notre propre identité en tant que citoyen de ce monde.

L’exemple le plus frappant de la violation de notre identité est le fait que les firmes transnationales imposent des aliments génétiquement modifiés. Dans une manœuvre de dernière minute, les USA et l’UE ont tenté de faire entrer dans l’OMC, par un« groupe de travail biotechnologie", la discussion sur la Biosécurité et les OGM – qui est de déterminer si nous avons le droit de nous protéger contre l’importation de produits aux OGM. Nous considérons cela comme une violation scandaleuse et provocatrice de nos droits de citoyens.

Via Campesina rejette les politiques néo-libérales qui poussent les pays à produire pour l’exportation au détriment de la production alimentaire domestique. Les pays en voie de développement sont forcés à accepter ces politiques pour payer leur dette extérieure et doivent ouvrir leurs frontières à l’importation d’aliments, ce qui augmente encore cette dette.. Les gouvernements des pays riches, pour compenser les baisses de prix et permettre aux firmes transnationales d’acheter moins cher, accordent des aides publiques massives sans limite par exploitation. Les fonds publics soutiennent donc directement ces firmes et non les paysans. Il s’agit d’un cercle vicieux qui bénéficie seulement aux firmes transnationales. Ces politiques contribuent à faire baisser les prix bien en-dessous du coût réel de la production.

Il ne fait aucun doute que l’OMC est un instrument qui donne aux firmes transnationales plus de contrôle et plus de profit. L’OMC est une institution totalement inappropriée à la prise de décisions démocratiques et à la formulation des politiques sur des questions importantes telles que la souveraineté alimentaire, la santé, la législation environnementale, la gestion des ressources génétiques, de l’eau, de la forêt et de la terre, ainsi que pour l’organisation des marchés agricoles.

Une profonde réforme de l’OMC pour qu’elle puisse répondre aux droits et aux besoins des populations signifierait l’abolition de l’OMC elle-même ! Nous ne pensons pas que l’OMC permettra une telle réforme. C’est pourquoi Via Campesina, en tant que mouvement international responsable dans le secteur agricole, demande que l’agriculture soit exclue de l’OMC. Sortons l’agriculture de l’OMC est peut être un terme plus approprié. Nous invitons les autres secteurs à faire la même demande. Nous, en tant que sociétés, devons créer une alternative aux politiques actuelles néo-libérales et aux institutions telles que l’OMC, la BM et le FMI. Nous devons civiliser ces politiques internationales et ces institutions. Via Campesina invite les mouvements sociaux à initier un processus de participation avec les gouvernements nationaux afin de développer un modèle alternatif.

Il faut établir des alternatives aux politiques néo-libérales aux institutions internationales telles que l’OMC, le FMI et la BM. Continuer à mobiliser l’opinion publique pour faire pression sur les firmes transnationales et les grandes puissances commerciales. Renforcer les Nations-Unies et développer de nouveaux instruments en son sein pour augmenter la transparence et le contrôle démocratique. Ces institutions devraient représenter les priorités et les besoins des populations et assurer la sécurité alimentaire ainsi qu’un commerce juste.

Via Campesina demande :

 Un moratoire immédiat sur les• prochaines négociations de l’OMC. Ce qui inclut aussi de stopper toute  Annuler•discussion sur l’accord concernant les investissements.  immédiatement l’obligation d’accepter une importation minimum de 5% de la consommation intérieure. Toutes les clauses d’accès obligatoire au marchés doivent être supprimées.  Une évaluation des impacts des accords de Marrakech et une correction• immédiate des injustices.  Sortir de l’OMC, et de tous les accords bilatéraux régionaux, toute• négociation concernant les domaines de la production alimentaire, leur  Créer des mécanismes internationaux réellement•commercialisation.  démocratiques pour réguler le commerce alimentaire, en respectant la  Assurer la souveraineté•souveraineté alimentaire dans chaque pays.  alimentaire dans chaque pays en donnant priorité à la production alimentaire pour leur propre population, ainsi qu’aux aspects sociaux  Donner à chaque pays le droit de définir sa•et environnementaux.  propre politique agricole de manière à couvrir les besoins internes. Cela inclut le droit d’interdire l’importation de manière à protéger la production domestique, et de mettre en œuvre une Réforme Agraire donnant accès à la terre aux sans-terre et aux petits et moyens paysans .  Stopper toute forme de dumping. Protéger la production domestique, et• avant tout celle des aliments de base.  Interdire la biopiraterie et le brevetage du vivant (animaux,• plantes, parties du corps humain), ainsi que le développement par la  Laisser le droit•technologie génie génétique de variétés stériles.  aux pays d’établir des critères de qualité adaptés aux préférences de leur population.

Via Campesina veut soutenir le Tribunal International des Peuples dont le devoir est de juger les crimes perpétrés contre les communautés paysannes et indigènes.

Via Campesina appelle les mouvements internationaux et nationaux, ainsi que les organisations non-gouvernementales à construire des alliances solides pour continuer la lutte contre les politiques néo-libérales et construire des alternatives. Si nous continuons à travailler ensemble nous gagnerons !
Mondialisons la lutte ! Mondialisons l’espoir !