Suisse : sans prix rémunérateurs, des salaires difficiles à atteindre bien que justifiés

Communiqué de presse d’Uniterre

(Lausanne, le 07 mars 2014) En mai, nous voterons sur l’initiative dite des « salaires minimaux » qui exige que chaque personne employée gagne au minimum 22 Francs suisse de l’heure, soit pour une large part des personnes concernées, l’équivalent de 4’000 francs par mois. L’USP, dans un récent communiqué titrait « un projet hors de prix pour les familles paysannes ». Positionnement un peu court selon Uniterre.

Dans l’agriculture, le salaire des ouvriers agricoles se situe autour de 12 à 14 Francs suisses /heure (Genève 17 Francs suisses / heure) pour des semaines de travail représentant entre 50 et 55 heures hebdomadaires de travail en moyenne. Pour les paysans, selon l’Office de la statistique, le salaire d’une unité de travail de la familiale paysanne se situait aux environs de 3’600 francs par mois pour 60 heures hebdomadaires, soit une moyenne de 14 Francs suisses / heure. Ainsi, paysans comme employés agricoles réalisent des salaires horaires dérisoires. La situation actuelle n’est guère satisfaisante, elle est même aggravée par le fait que chaque canton possède son propre contrat-type ce qui provoque une concurrence entre producteurs au niveau des coûts salariaux.

 

 Le manque de volontarisme de l’Union Suisse des Paysans au fil des ans, respectivement de certaines de ses sections influentes, nous met le dos au mur. Sa politique de l’autruche – encouragée il faut le dire par un manque d’intérêt des syndicats ouvriers pour les travailleurs agricoles – fait que les conditions des paysannes et des paysans comme de leurs employés sont d’un autre siècle.

Si l’Union Suisse des Paysans s’était battue avec plus de conviction pour défendre des prix équitables et donc des revenus convenables pour les familles paysannes, il aurait été beaucoup plus aisé de rémunérer dignement les ouvriers agricoles. Si son discours avait été : « pour que le 1er maillon de la chaine, constitué des familles paysannes et des employés puisse vivre avec son temps, nous devrions obtenir 1 Franc suisse  par litre de lait et 1 Franc suisse par kilo de céréales panifiables », nous n’en serions pas là (1). Alors qu’elle avait l’occasion de corriger le tir dans le cadre de son initiative populaire fédérale « sécurité alimentaire », elle a préféré passer outre ces questions de rémunération.

Aujourd’hui, il faut inverser le discours. A combien doit être vendu un produit pour que paysans et paysannes, ouvriers et ouvrières puissent vivre correctement ? C’est une revalorisation du 1er maillon de la chaîne alimentaire qui doit être exigée. Et si, comme les paysans, les employé-e-s gagnent mieux leur vie, que nous leur tendons la main en reconnaissant que nous sommes les « mêmes victimes » d’une répartition inégale de la valeur ajoutée dans une filière, alors nous pouvons attendre d’eux qu’ils contribuent aussi pleinement à la consommation suisse, plutôt que d’aller remplir leurs cadis dans les supermarchés hors de nos frontières.

Le Conseil fédéral, dans sa conférence de presse, ne fait guère mieux que l’Union Suisse des Paysans. Justifier les bas salaires pour maintenir la compétitivité de la Suisse, c’est avouer à demi-mot le dysfonctionnement de notre système économique. Surtout si l’argumentation est complétée par le fait que les assurances sociales seraient là pour compenser… Rappelons que les prestations sociales ne sont pas un dû. Elles peuvent vous être retirées à tout moment. Non le salaire minimal n’est pas trop élevé, c’est les prix de nos produits agricoles qui sont trop bas pour pouvoir le garantir.

Une alimentation saine, de proximité, respectueuse de l’environnement comme des Hommes, passe par une revalorisation conséquente de tous les acteurs de la terre !

Dans la situation économique actuelle, et au grand regret d’un syndicat paysan comme Uniterre, il n’est pas possible de soutenir une initiative exigeant un salaire horaire de 22 Francs suisses de l’heure. Nous restons par contre ouverts à chercher à l’avenir, avec les syndicats, des solutions qui profitent aux uns et aux autres si, bien sûr, l’initiative de devait pas passer la rampe de la votation populaire.

Contacts presse :

Charles Bernard Bolay, charles-bernard@bluewin.ch, 079 409 14 42, Président Uniterre (f)

 Rudi Berli, 078 707 78 83, r.berli@uniterre.ch , Président section genevoise Uniterre (f/d)

(1) Voir la brochure Uniterre « Brisons le tabou des prix » où le prix des produits est calculé sur une base de 20.-/heure pour les employés et 40.- heure pour les paysans) .http://www.uniterre.ch/index.php/fr/dossiers/grandes-cultures-viandes/642-copy-of-prix-producteurs-consommateurs-brisons-le-tabou-406