Europe : Mettre la PAC sur les bons rails

Communiqué de presse de la Coordination Européenne Via Campesina

(Bruxelles, le 1 septembre 2016) En raison de la rencontre informelle du Conseil des ministres de l’Agriculture de l’Union Européenne ce 2 septembre à Chambord, ECVC, avec ses confrères de la Confédération Paysanne, se mobilise pour dénoncer la situation et sensibiliser sur les effets de la crise qu’une PAC adaptée aux accords de libre-échange et axée sur l’élimination des instruments de régulation du marché a provoqué sur les producteurs ainsi que sur les citoyens européens. (Voir des photos de la mobilisation ici). ECVC veut aussi envoyer un message clair aux ministres de l’Agriculture : nous avons besoin d’une autre politique agricole et alimentaire qui protège les droits fondamentaux de la population et qui mette le marché au service des citoyens.

La Coordination Européenne Via Campesina salue l’initiative du ministre français de l’agriculture Stéphane le Foll de rassembler ses homologues à Chambord pour un conseil informel autour de la future Politique Agricole Commune . La réunion sera courte, dans un lieu royal au symbolisme douteux, mais elle a lieu au cœur d’une crise agricole intense dont nous espérons qu’elle donnera aux ministres la clairvoyance et l’ambition d’un changement profond de CAP dans les mois à venir.

Porc, viande, fruits, céréales, produits méditerranéens, quasiment tous les secteurs sont touchés par les effets d’une politique agricole qui a abandonné l’essentiel des outils permettant de réguler les productions, donc les prix et les revenus des producteurs.

La situation laitière est caractéristique du désastre que vivent les campagnes : avec un prix au dessous de 30 voire 25 ct le litre alors que le coût de production atteint au minimum 35 ct *, jour après jour, des éleveurs laitiers cessent leur activité dans le désespoir. En France, en Belgique, en Espagne , Portugal, Italie, Europe Centrale et de l’Est, aucun pays n’est épargné par la disparition des paysans qui dévaste de nombreuses zones rurales.

La situation est particulièrement schizophrène, alors que l’UE s’apprête à célébrer à Cork, en Irlande, les 20 ans du «développement rural», qui constitue le «deuxième pilier» d’une PAC désespérément boiteuse.

Si elle veut garder une légitimité auprès de citoyens dégoûtés d’une Europe au service des lobby industriels et financiers, les futures politiques agricoles et alimentaires devront prendre un virage radical, pour se mettre au service des peuples. Une Politique agricole et alimentaire commune légitime doit répondre aux besoins des populations et se structurer autour des droits humains fondamentaux.

Elle doit assurer le droit à l’alimentation, y compris des populations les plus pauvres et marginalisées, elle doit respecter le droit au revenu et à une vie digne pour les agriculteurs et les agricultrices ainsi que tous les droits des salariés du secteur agricole et alimentaire, locaux ou migrants. Elle doit assurer un environnement sain à l’ensemble des citoyens aujourd’hui et pour les générations futures et permettre la transition de tous les producteurs vers une agriculture agroécologique et paysanne. Les politiques commerciales doivent être cohérentes avec ce choix, permettant la souveraineté alimentaire en Europe comme pour les pays tiers.

C’est possible, le budget de la PAC qui représente près de 60 Md annuel, soit un tiers des dépenses de l’UE, peut être drastiquement modifié en accord avec ces objectifs et dans un but d’une répartition nouvelle, garantissant la solidarité avec, et au sein des territoires ruraux. Ce serait également possible avec une PAC efficace qui ne renonce pas à intervenir dans la régulation du marché et de la production à travers un large éventail d’instruments publics qui n’impliquent pas des dépenses du budget de l’Union européenne.

ECVC salue les actions des producteurs et soutient la mobilisation des agriculteurs en Europe, comme celles réalisées en France envers Lactalis, ou en Allemagne contre le groupe DMK, entreprises emblématiques de l’agression et de l’hégémonie commerciale des multinationales sur les politiques européennes. Ces entreprises pour lesquelles le lait est une simple commodité, pèsent lourdement sur l’évolution du secteur, l’agrandissement et l’industrialisation des exploitations agricoles. Nous exhortons les autres organisations qui convoquent ces manifestations de nous rejoindre pour dénoncer les causes qui conduisent à cette situation et ainsi rejeter l’abandon des politiques de régulation publique et donc les accords de l’OMC, TAFTA, CETA, MERCOSUR. Il est impossible de défendre les exportations agricoles sans détruire les agriculteurs.

Des milliers de jeunes européens sont prêts à travailler pour nourrir leurs concitoyens et entretenir l’espace, les politiques doivent prendre la mesure des enjeux et donner des perspectives autres que la loi du marché et une compétition mortifère. Des prix stables et rémunérateurs et la reconnaissance pour un métier d’utilité publique sont seuls à même de donner espoir et confiance.

* sans compter la rémunération du producteur

Contacts :

Geneviève Savigny: (Comité de coordination ECVC) + 330625551687 FR-EN
Jose-Miguel Pacheco: (Comité de coordination ECVC) +35 19 1873 6441 PT-ES
Andoni Garcia: (Coordinadora de Organizaciones de Agricultores y Ganaderos- ECVC) +34 63 645 1569 ES – présent à Blois le 2 septembre