Des politiques vides qui vident nos assiettes
Communiqué de presse du Forum de la Société Civile “Terra Preta
Les représentants et représentantes internationaux des petits paysans, des pêcheurs, des peuples indigènes, des bergers ainsi que d’autres organisations non-gouvernementales (ONG) ont exprimé leur déception suite aux piètres résultats de la Conférence de Haut Niveau pour la Sécurité Alimentaire à Rome. “La déclaration finale ne remplira aucune assiette, tandis que les recommandations demandant plus de libéralisation auront pour conséquence davantage de violations du droit à l’alimentation”, a déclaré Maryam Rahmanian de l’organisation iranienne CENESTA. En même temps que la conférence officielle, les mouvements sociaux ont tenu leur propre forum “Terra Preta”, dans le but de faire entendre leur demande de consécution de la souveraineté alimentaire et du droit à l’alimentation pour des millions de personnes affamées. “Les revendications des mouvements sociaux pour plus de protection et de soutien aux petits paysans, pour une réforme agraire intégrale et des mesures concrètes contre la spéculation financière ont été complètement ignorées par les gouvernements”, affirme Herman Kumara, du Forum Mondial pour les Pêcheurs, Sri Lanka. “C’est décevant que les gouvernements refusent de reconnaître que la crise actuelle est le résultat des politiques d’ajustement structurel qui durent depuis des décennies et qui constituent des violations systématiques du droit à l’alimentation”, ajoute Flavio Valente de FIAN International. “C’est un pas en arrière. En 2004, tous les gouvernements de la FAO avaient adopté les lignes directrices du plan pour le droit à l’alimentation.”
“Les organisations de la société civile dénoncent les recommandations de la nouvelle « task force » de l’ONU pour la crise alimentaire où sont impliqués la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International. Cette task force instituée par le Secrétaire General de l’ONU Ban Ki Moon a recommandé davantage d’ouverture des marchés au sud, des importations d’aliments subventionnés par l’aide au développement et une Nouvelle Révolution Verte. “Ces solutions proposées par Ban Ki Moon vont saper graverment la souveraineté alimentaire dans les pays du sud. Le plan d’action qui est proposé n’est pas la recette contre la faim qu’il est censé être”, dit Maryam Rahmanian. “Nous sommes très préoccupés du fait que ce plan ne sera pas transmis aux gouvernements pour être débattu. C'est tout simplement un moyen d'afficher le consensus entre l’ONU et les Institutions de Bretton Woods. Nous avons peur que cette initiative mine davantage les politiques alimentaires démocratiques à travers le monde ».
« C’est honteux que les gouvernements ne fassent pas en sorte que les multinationales des céréales et des semences et qui produisent des aliments industrialisés profitent de la crise pour augmenter leurs bénéfices « , conclut Dena Hoff, de la Coalition National pour l’Agriculture Familiale, membre de Via Campesina, Etats-Unis. « Au cours du premier trimestre 2008, les bénéfices de Monsanto ont grimpé de 108%, ceux de Cargill de 86%. Une Nouvelle révolution Verte et davantage d’aide alimentaire profiteraient énormément à ces entreprises, mais cela n'apporterait pas de solution aux pauvres ni aux affamés ». Diwali Martínez, du Movimiento de la Juventud Kuma, Panama, ajoute : « Les grandes multinationales ont eu plus d’espace que jamais lors d'une conférence de la FAO, pendant que les peuples indigènes, les bergers, les paysans et les pêcheurs ont été plus marginalisés que jamais » Dans la déclaration finale de Terra Preta, et dans la déclaration « No more failures as usual », signée par plus de 900 organisations, les organisations de la société civile ont fait des propositions très concrètes pour combattre la faim. « Les chefs d’Etat ne devraient pas uniquement parler des paysans et des paysannes, ils devraient surtout écouter ce qu’ils ont à proposer », clonclut Akylbek Rakaev, de l’Association Kyrguize des Éléveurs de Moutons.
Rome, le 24 juin 2008