Déclaration des femmes à Seattle sur L’OMC

Le 3 décembre 1999
A SEATTLE, LES PAYSANNES DISENT NON A L’OMC "On ne peut napper de sucre un gâteau pourri". Voilà ce qu’ont déclaré les paysannes de Via Campesina faisant référence à l’Organisation Mondiale du Commerce.

Se considérant elles-mêmes comme le lien le plus important entre producteurs et consommateurs, des paysannes du monde entier affirment que la libéralisation du commerce force les producteurs agricoles à produire des aliments peu sûrs, culturellement inacceptables et chers pour la majorité des gens de la planète. Nous voulons avoir la responsabilité de nourrir nos enfants et les générations futures avec de la nourriture saine. Les femmes ont été affectées négativement par la libéralisation. L’accès à la terre est plus inaccessible que jamais car nos terres familiales sont affectées par la privatisation et la concentration de la terre. Nous vivons un processus de féminisation de la pauvreté, et nous sommes forcées de travailler notre terre sans aucune rémunération. Nous n’avons pas de salaire qui garantirait à notre famille de pouvoir rester sur sa terre. Une concurrence injuste réduit nos possibilités de commercialisation. Les programmes sociaux ne font que déguiser la pauvreté et sont des instruments qui réduisent la capacité de production de nos familles. Ils nous rendent chaque fois plus dépendantes de l’aide extérieure. Nous sommes contraintes de migrer et de devenir travailleuses agricoles sans terre ou ouvrières d’ usine dans lesquelles nous subissons constamment des violations de notre dignité et de nos droits. Notre santé est menacée par les conditions de travail et les produits chimiques utilisés dans la production industrielle et les usines.

Nous croyons en un commerce juste. Mais nous croyons que rien ne changera si nous ne changeons pas fondamentalement les structures de l’économie mondiale. Il ne peut y avoir de libre échange dans une situation où quelques pays riches dictent les termes du commerce aux dépens d’une majorité de pays pauvres. Nous considérons l’OMC comme un instrument antidémocratique qui sert à protéger les intérêts de grandes firmes multinationales. L’OMC s’introduit elle-même dans la vie des consommateurs et des producteurs contre leur volonté. L’OMC promeut un système totalement illégitime. Les femmes de Via Campesina exigent des règles de commerce dans un cadre visant à :

  • un appui pour la production locale et la fin immédiate de tout dumping alimentaire,
  • la reconnaissance des droits des communautés et des paysans à la place des droits de propriété intellectuelle,
  • le droit de chaque pays à décider ses propres politiques agricoles définissant ses critères de qualité afin de répondre aux besoins de sa population, ainsi que
  • la réforme agraire pour donner aux femmes et aux hommes le droit de produire leur propre alimentation et le droit de protéger leur production. Nous considérons ceci comme un droit humain fondamental. Malgré toutes les protestations de Seattle, nous voulons remercier l’OMC car elle nous a permis d’unir les petits paysans du monde entier. Pendant cette semaine de travail à Seattle, nous avons réussi à mondialiser la lutte et à mondialiser l’espoir.