Déclaration de la 6e Assemblée des femmes CLOC-LVC (Amérique Latine)
26 juin 2019
Dix ans après le moment historique où, ici même à l’école Niceto Pérez de l’ANAP, la CLOC-LVC a annoncé que les paysannes et paysans d’Amérique latine avaient ouvert la voie vers le socialisme, nous, les femmes, nous nous sommes levées et avons crié haut et fort, SANS FÉMINISME, IL N’Y A PAS DE SOCIALISME.
Réunies dans la 6e Assemblée des femmes paysannes dans le cadre du 7e Congrès de la Coordination latino-américaine des organisations rurales (CLOC-LVC), à Güira de Melena, province d’Artemisa, Cuba, des femmes provenant de 21 pays, déléguées par nos organisations, imprégnées des avancées historiques des femmes cubaines, inspirées par l’esprit révolutionnaire de Vilma Espín, de Celia Sánchez et de leur peuple, nous nous donnons le défi de continuer à approfondir nos mouvements historiques qui ont maintenu vivante la résistance des femmes rurales contre le système capitaliste et patriarcal.
Nous, membres de la 6e Assemblée des femmes de la CLOC-LVC, nous sommes conscientes des assauts du capitalisme dans notre Amérique qui continue de piller la nature, notre bien commun, et d’exploiter nos terres avec la complicité de gouvernements laquais qui portent atteinte à la vie des populations rurales et surtout des femmes. Ces femmes qui luttent depuis des décennies contre toutes les formes d’exploitation, de discrimination et de subordination. Dans ce sens, nous assumons l’engagement de renforcer l’unité dans la diversité afin de changer le système capitaliste et néolibéral qui place les intérêts du capital au-dessus des droits des peuples à une bonne vie, à la protection de la Terre mère et à la souveraineté alimentaire.
Nous, les femmes rurales, nous luttons pour une société équitable et égalitaire qui transforme les relations de pouvoir qui ont marqué la subordination des femmes et surtout de celles qui vivent en milieu rural dans des conditions de pauvreté et de discrimination. Ces relations nous ont soumises à des politiques patriarcales, à des systèmes d’exploitation par les multinationales de l’agrobusiness, aux déplacements et migrations forcés et à la violence.
Au cours des deux décennies de formation sociopolitique, nous avons réalisé une étude détaillée des catégories genre, classe et groupes éthiques/raciaux. Nous avons compris que les inégalités qui touchent les femmes sont structurelles et le produit d’une société capitaliste, patriarcale, colonialiste et raciste. Nous sommes convaincues que l’oppression, la domination et l’exploitation sexuelles et raciales ne peuvent être éradiquées sans éliminer l’oppression de classe.
Dans la construction du féminisme paysan et populaire, à partir de notre évolution et de notre définition politique, nous avons présenté avec force une proposition qui, à partir de notre diversité et de notre autoreconnaissance, nous conduit à la construction du pari politique d’une identité paysanne et populaire féministe. Bien que le féminisme soit composé de points de vue divers, nous, des organisations paysannes, nous reconnaissons que le féminisme a produit des contributions précieuses pour transformer la vie des femmes aux niveaux politique, social et économique. Pour la CLOC-LVC, cet effort devient une action politique également orientée vers la création d’une société socialiste.
Dans ce processus de construction féministe qui émerge des territoires et des peuples des campagnes, le débat va de pair avec l’action et la lutte pour en finir avec la violence contre les femmes rurales, et la lutte contre les agro-entreprises et les produits agrotoxiques. Le patrimoine de nos peuples au service de l’humanité, c’est la lutte pour la vie et la défense des semences, pour le droit égal à la propriété foncière, contre l’exploitation, la violence et les mauvais traitements au travail et pour des salaires justes et égaux. L’agroécologie en tant que système de production ancestral qui garantit la souveraineté alimentaire représente une contribution importante pour les femmes de la CLOC/LVC qu’elles adoptent dans la perspective d’avancer dans la transformation de la société. Et la lutte pour l’agroécologie appartient à l’ensemble du mouvement paysan mondial. C’est ainsi qu’elle donne du contenu au féminisme paysan et populaire.
Les grands défis sont : continuer d’avancer dans le renforcement de nos organisations ; construire l’unité et l’alliance des mouvements ; poursuivre la formation politique pour offrir à l’ensemble des militants et militantes des organisations paysannes, autochtones et afrodescendantes l’occasion de participer à un débat de fond d’où émergeraient les bases de notre proposition d’une société socialiste qui, unie dans la diversité, nous mène vers les transformations sociales avec une conscience de genre et générationnelle.
Maintenir notre regard sur l’unité de la lutte de genre et de la lutte des classes est important pour affronter les actions de l’empire, du capital et du patriarcat et ainsi pouvoir identifier et affronter nos ennemis.
Nous saluons et nous nous engageons à poursuivre une grande vague féministe qui émerge avec la force des femmes, contre le machisme et le patriarcat, contre la violence et le harcèlement sexuel, pour le droit de décider de notre corps et pour le droit à la santé sexuelle et reproductive. Et nous préconisons que ces forces s’unissent à la lutte pour des changements radicaux dans notre société, la menant à vivre dans la dignité, avec équité et justice. Nous, à partir de notre identité et de notre conception féministe paysanne et populaire, nous contribuerons à cette avancée des visions féministes.
Nous, les déléguées de 21 pays à cette 6e Assemblée des femmes de la CLOC-LVC, nous nous prononçons et condamnons fermement les agressions contre le peuple frère du Venezuela et les tentatives de déstabilisation de la droite réactionnaire au Nicaragua. Nous rejetons la loi Helms-Burton qui renforce le blocus et l’embargo contre la révolution cubaine. Nous condamnons également les féroces attaques du capitalisme contre tous les peuples d’Amérique. Nous rejetons les stratégies de déstabilisation et de soumission contre les pays d’Amérique latine, notamment la militarisation des territoires et l’enlèvement et la séquestration de nos États.
Nous appelons les peuples du monde à s’unir d’une seule voix pour rejeter ces actions internationalistes qui visent à soumettre nos peuples. Nous condamnons les centaines d’assassinats de leaders sociaux paysans et autochtones de notre Amérique et nous nous prononçons en faveur de la poursuite du renforcement des accords de paix en Colombie.
Nous demandons aux gouvernements du triangle nord d’Amérique centrale (Guatemala, Honduras, Salvador), du Mexique et des États-Unis de respecter les droits humains des milliers de familles qui ont entrepris des caravanes d’immigrants, en particulier les femmes et les filles.
Les femmes de la campagne de la CLOC-LVC, nous terminons notre 6e Assemblée en affirmant : Avec le féminisme, nous construisons le socialisme !
Depuis nos territoires, unité, lutte et résistance pour le socialisme et la souveraineté des peuples.
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