Chronique d’un activiste à Hong Kong

Journée en trois actes
Acte I. Rassemblements à Victoria Park
Une fois de plus, Victoria Park a connu dès les premières heures de la matinée un véritable fourmillement d’activités. Trois rassemblements s’y sont donné rendez-vous: celui convoqué par la Délégation coréenne et La Vía Campesina, celui de l’Alliance des Peuples de HongKong et celui des Pêcheurs artisans de SEAFM, KM qui avaient au préalable fait la une dans les eaux du port en manifestant contre l’OMC. Retenons surtout la force de l’organisation. Les interventions des différentes délégations de La Vía Campesina lors de l’ouverture de cette journée nous ont fait voir la valeur du travail patient mené pour construire un réseau international. Ce travail a permis de définir des objectifs et des stratégies communes qui constituent le ciment de tout engagement militant et créent une capacité de mobilisation digne de louanges. C’est ce qui fait la différence lors de ces sommets entre le niveau de mobilisation à niveau international des organisations paysannes et celui d’autres secteurs sociaux.

Acte II. La mobilisation
A un moment donné (suite aux derniers suicides coréens en signe de protestation contre les politiques de l’OMC) notre cœur s’est serré: lorsque nous avons vu une multitude de paysans et paysannes coréens se jeter à l’eau à la fin de la manifestation. Mais finalement, ce ne fut qu’une protestation singulière visant à exprimer leur désespoir (à cause des terres qui leur sont saisies et des dettes qui les asphyxient) “ils ont nagé pour faire couler le sommet ”.
Même si la manifestation n’a pas réussi à ouvrir une brèche dans la barrière policière afin de transmettre le message à l’assemblée du Sommet, cela a servi – de même que dans le cas de la manifestation de dimanche- à continuer à récolter les sympathies des habitants de Hong Kong. Habitants qui se sont rendus dans la rue tout le long du parcours de la manifestation faisant ainsi fi des messages transmis par les autorités et les médias. Ce qui n’est pas rien. Sur le trajet de retour vers Victoria Park (qui s’est transformé en une nouvelle manifestation), ils ont même manifesté leur appui à la protestation.

Acte III. L’ouverture
En dépit du silence informatif imposé par certains médias (par ex. El País), Pascal Lamy a dû faire appel au service d’ordre afin d’éviter que les protestations des délégations des ONGs et mouvements sociaux (portant des banderoles avec le slogan “L’OMC tue les paysans”) l’empêchent de terminer son discours inaugural où il a défini les actes de rapine comme objectif principal du sommet: “Comment peux-tu prendre le petit du tigre si tu ne te risques pas à entrer dans sa tanière?”. Le risque exigé pour obtenir la proie est que “les Etats Unis et l’Union européenne (sacrifient) leurs subventions.”  Comme si le “sacrifice des subventions” avec la libéralisation totale du marché n’allait plus entraîner de préjudices pour les économies des pays pauvres.
Trois actes de l’ouverture du Sommet ayant marqué le début d’une semaine qui, autant ici qu’ailleurs dans le monde, va mettre à l’épreuve la capacité de résistance des pays pauvres et des mouvements sociaux, mais qui a déjà mis en évidence que l’opposition à l’OMC progresse partout sur la planète.
Josu Egireun
13-12-2005