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#25Nov23 | C’est avec conviction que nous ouvrons la voie au Féminisme Paysan et Populaire, que nous construisons la Souveraineté Alimentaire et que nous luttons contre les crises et les violences

Bagnolet, 10/11/23 | Appel à l’action — Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes


La Via Campesina, en ce 25 novembre, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, tire la sonnette d’alarme concernant les différentes formes de violence subies par les femmes dans le monde. Sur fond de crises et de violences, de guerres, d’occupation, d’expulsions, nous, les femmes paysannes, pêcheuses, bergères, indigènes, quilombolas, sans-terre, migrantes et travailleuses agricoles, continuons de résister en Palestine, en Haïti, à Cuba, au Niger, au Pérou et dans tous les territoires. Nous écrivons l’histoire de la lutte contre le capitalisme, le patriarcat, le racisme, le colonialisme et la montée du fascisme. 

En Palestine, au cours de 25 jours consécutifs d’attaques contre des civil.es, 8 525 Palestinien.nes ont tragiquement perdu la vie, et 67 % des victimes étaient des femmes et des enfants. Cela a non seulement entraîné des pertes humaines, mais aussi la destruction massive de nombreuses maisons, d’hôpitaux, d’écoles et d’infrastructures essentielles, le tout sans aucun avertissement préalable d’évacuation. Les femmes qui subissent les dures réalités de cette occupation sont obligées de vivre dans des conditions épouvantables car elles ont été déplacées de force. Parmi elles, des femmes enceintes qui ont besoin de soins médicaux essentiels et d’autres produits de première nécessité pour nourrir leurs bébés, tout en étant privées des conditions de vie les plus élémentaires. L’occupation israélienne a imposé un siège total, limitant sévèrement l’accès à la nourriture, à l’eau et au carburant au cours des trois dernières semaines. Ce siège utilise la famine comme tactique cruelle et inhumaine, causant d’immenses souffrances parmi les femmes qui n’ont pas d’endroit sûr pour vivre et fournir les soins urgents nécessaires à leurs enfants.

Nous profitons de cette journée pour dénoncer l’incapacité des États à respecter leurs obligations, à construire une politique publique d’égalité des droits. Nous dénonçons un système judiciaire patriarcal et complice, qui protège les agresseurs, favorise une culture de l’impunité et de violence à l’égard des femmes, des filles et des diversités.

Comme l’a déclaré Morris Tidball-Binz, rapporteur spécial de l’ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, dans son rapport en 2023 : « le féminicide est une tragédie mondiale aux proportions pandémiques et, chaque année, des dizaines de milliers de filles et de femmes, y compris des femmes transgenres, sont tuées dans le monde entier en raison de leur genre et beaucoup d’autres risquent de mourir de violences de genre parce que les États manquent à leur devoir et ne protègent pas de manière efficace la vie des victimes et n’assurent pas leur sécurité ».

Depuis la création de notre mouvement, pendant ces 30 années de lutte et d’organisation, la Souveraineté alimentaire en tant que principe politique a permis aux femmes rurales de dénoncer le système capitaliste. Ce dernier étant à l’origine de multiples injustices et inégalités dont nous souffrons aujourd’hui, il a transformé les aliments en marchandises agro-industrielles, privilégiant les intérêts du marché, empoisonnant la terre et menaçant la subsistance de l’humanité et la vie sur notre planète.

Nous, les paysannes, jouons un rôle clé dans la lutte contre la faim et pour la défense de la Souveraineté alimentaire, la préservation de la biodiversité, la récupération des semences indigènes, la protection de l’eau, des sols et des savoirs ancestraux. En même temps, nous constituons l’un des fronts de la lutte, de la résistance et de la résilience face aux crises politiques, économiques et environnementales. Grâce aux pratiques agroécologiques, nous garantissons une gestion durable de la terre mère et promouvons une économie féministe, solidaire et juste.

De plus, nous dénonçons les conséquences des politiques néolibérales et fascistes sur le corps et la vie des femmes. Nous condamnons le manque de droits fondamentaux tels que l’éducation, le logement, la santé, les droits sexuels et reproductifs ainsi que la liberté de mouvement, d’organisation et de communication.

Le monde fait machine arrière et l’on constate une perte inquiétante de droits fondamentaux et historiques dans un contexte aux crises multiples causées par les guerres, la crise climatique, la pauvreté et les pandémies qui ont un impact évident sur le genre et touchent de manière disproportionnée les filles et les femmes.

Que ce soit avant, pendant ou après la pandémie de la COVID 19, nous, paysannes, avons toujours fait de la Souveraineté alimentaire une solution concrète pour faire face à ces crises.   Nous continuons de produire plus de 70 % des aliments et nous représentons 50 % de la main-d’œuvre dans les campagnes. Et pourtant, nous possédons moins de 2 % des terres, des infrastructures et des services de base.

De même, nous considérons la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysans, adoptée en 2018, comme un outil politique permettant de lutter, défendre nos droits et orienter les politiques publiques afin de garantir une vie digne dans les campagnes et une alimentation saine pour l’humanité et la vie sur notre planète.

En cette journée d’action #25N23, aux côtés des femmes organisées et rebelles du monde entier, nous appelons à une journée de mobilisation, de formation et d’échanges à l’occasion de forums, d’actions directes dans les tribunaux, de foires et d’autres événements dénonçant les violences quotidiennes et structurelles dont souffrent les femmes et la diversité paysanne. Nous battrons le pavé et nous nous mobiliserons sur les réseaux sociaux pour y présenter nos propositions politiques, dénoncer le capitalisme, le patriarcat, l’État et la justice qui sont les principaux complices des violences et des crises que nous traversons aujourd’hui.

Vers notre 8e Conférence internationale et notre 6e Assemblée internationale des femmes à Bogota

Depuis sa création, La Via Campesina cherche à garantir la participation des femmes rurales à tous les niveaux d’action, de pouvoir et de représentation pour la construction d’un mouvement international large, démocratique, politiquement et socialement engagé dans la défense de l’agriculture paysanne, de la Souveraineté alimentaire, de la lutte pour la terre, de la justice, de l’égalité et de la lutte contre toutes les formes de violence de genre.

Nous avons réalisé d’importants progrès depuis la première Conférence et Assemblée des femmes de la Via Campesina : la parité hommes-femmes, le Féminisme Paysan et Populaire et les luttes contre la violence. De plus, nous avons pu démontrer notre rôle stratégique sur des sujets tels que la Souveraineté alimentaire, les systèmes alimentaires ou encore la Déclaration sur les droits des paysan·ne·s.

« Ces espaces sont essentiels pour parler des contextes de ces violences, de la consolidation de la droite, du fascisme et du néofascisme. Et de tout ce que cela implique dans la vie des femmes rurales. Il y a encore beaucoup de violence politique, alors pendant l’Assemblée, nous devons étudier en profondeur les causes de cette violence. Avec conviction, comme le dit notre slogan, mais sans peur », a déclaré Adriana Mezadri, du Mouvement des femmes paysannes du Brésil et de l’Articulation des femmes de la région sud-américaine de La Via Campesina.

Les Assemblées internationales des femmes, qui se tiennent dans le cadre de notre Conférence internationale, Du 1er au 8 décembre, donnent au mouvement une ligne politique et un horizon, puisque c’est là que sont évaluées et planifiées les actions pour la période à venir. Notre première Assemblée internationale des femmes s’est tenue à Bangalore (Inde) en 2000 ; la deuxième à Sao Paulo (Brésil) en 2004 ; la 3e à Maputo (Mozambique) en 2008 ; la 4e à Jakarta (Indonésie) en 2013 ; et la 5e à Derio (Pays basque) en 2017.

Petra Ortiz, de l’Union paysanne panaméenne de la région d’Amérique centrale, explique qu’avant la 6e Assemblée internationale des femmes qui se tiendra à Bogota le 2 décembre, plusieurs réunions physiques et virtuelles, formations, rencontres et Assemblées ont été organisées : « Nous avons passé en revue l’histoire de l’Articulation, les progrès de l’Articulation dans La Via Campesina, les progrès du Féminisme Paysan Populaire en matière de justice. Nous avons également effectué un travail en interne. En effet, nous constatons qu’il existe encore de la violence au sein même des organisations, c’est pourquoi nous œuvrons aussi à la formation de nos camarades au féminisme, aux nouvelles masculinités et contre toutes les pratiques patriarcales.  Notre défi est également de continuer à intégrer les jeunes et de renforcer la solidarité. La migration est une question importante dans la région et dans le monde, ainsi que la crise environnementale qui ne fait qu’aggraver la situation dans les campagnes », dit-elle.

Campagne « Stop à la violence faite aux femmes » — « briser le silence » depuis 15 ans

La Campagne Internationale pour Stopper la Violence contre les Femmes célèbre son 15e anniversaire depuis son lancement lors de la 5e Conférence à Maputo en 2008, où La Via Campesina a “brisé le silence” et l’a conçue comme une forme de dialogue au sein du mouvement et avec la société sur l’importance de construire des relations humaines nouvelles et meilleures dans le cadre de la construction de nouvelles sociétés.

Anuka De Silva de l’organisation Morlar, du Sri Lanka (continent asiatique), explique que la population paysanne est vaste et s’étend sur de nombreuses zones rurales et cultures. La région promeut une campagne contre les microcrédits qui réduisent les paysannes à l’état d’esclaves en leur proposant des crédits impayables. « C’est aussi une forme de violence et nous voulons l’inclure dans notre campagne qui fêtera ses 15 ans lors de la 8e Conférence. Nous n’avons pas de terre dans nos sociétés patriarcales, nous demandons de changer les lois et nous nous battons pour des titres conjoints ». Elle a également souligné l’importance de renforcer la campagne contre les produits agrochimiques toxiques, qui ne se limitent pas à l’alimentation et qui entraînent la mort de femmes et d’enfants en Asie.  « La question de la migration est également très problématique dans plusieurs pays de la région, il n’y a pas de droit du travail, nous devons mobiliser les femmes et les pays pour qu’ils.elles obtiennent des droits. La crise environnementale a également provoqué des inondations et des sécheresses. Nous demandons une justice climatique et de véritables politiques », a-t-elle ajouté.

La campagne internationale « Stop à la violence faite aux femmes » fêtera ses 15 ans, elle a été lancée lors de la 5e Conférence de Maputo en 2008, où La Via Campesina a « brisé le silence ». Cette campagne a été conçue afin d’ouvrir le dialogue au sein du mouvement et avec la société concernant l’importance d’établir de nouvelles et meilleures relations humaines, dans le cadre de la construction de nouvelles sociétés. On ne sème pas la Souveraineté alimentaire avec des relations violentes et toxiques ! Cette campagne entend également dénoncer la violence de l’agrobusiness qui touche tout particulièrement les femmes rurales, les paysannes, les pêcheuses, les bergères, les sans-terre, les migrantes, les travailleuses agricoles, qui sont déplacées, empoisonnées, exploitées, criminalisées et tuées.


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