Sri Lanka : Les mouvements sociaux allèguent une déviation massive de terres d’une réserve naturelle pour un projet industriel d’aquaculture
Dans une décision controversée qui a suscité l’indignation des défenseur·es de l’environnement et du public, le gouvernement du Sri Lanka aurait décidé d’exclure 418 acres de la réserve naturelle de Vidataltivu dans le district de Mannar, dans la province du Nord du pays, prétendument pour l’expansion d’un projet industriel d’aquaculture. Selon les mouvements de la société civile au Sri Lanka, cette action sans précédent vise à faciliter l’expansion de l’élevage de crevettes de la société Taprobane Seafood Ltd.
Un rapport de la société civile publié la semaine dernière indique qu’en vertu des pouvoirs conférés par les sous-sections 1 et 4 de l’article 2 de l’Ordonnance sur la protection de la faune et de la flore, le ministère concerné a publié le Gazette Extraordinaire No. 2383/05 en date du 6 mai 2024, excluant une portion de terrain – 418 acres – de la réserve naturelle de Vidataltivu.
Selon le rapport, cette terre exclue est destinée à être allouée à Taprobane Seafood Ltd. pour un projet d’aquaculture. Taprobane Seafood Private Ltd., fondée en 2011, a récemment établi un partenariat stratégique avec Direct Source Seafood, une entreprise américaine de premier plan spécialisée dans les importations de crabes et de crevettes. Selon le Daily FT, Direct Source Seafood est l’un des plus grands importateurs de crabes et de crevettes aux États-Unis, gérant des programmes de crevettes et de crabes sous marque de distributeur pour des entreprises de grande distribution et des services alimentaires. Les personnes qui protestant contre la diversion des terres à Mannar affirment que ces actions servent principalement les intérêts de ces entreprises privées. Le rapport de la société civile indique également qu’à la demande, des fonctionnaires du ministère de la Conservation des Ressources Fauniques et Forestières ont révélé que la terre de la réserve avait été libérée sur directive de hauts fonctionnaires de l’État.
Par le passé, des tentatives ont également été faites pour détourner des parties de la Réserve naturelle de Vidataltivu à des fins industrielles. Par exemple, en 2017, l’Autorité nationale pour le Développement de l’Aquaculture (NAQDA) a développé une proposition pour un Parc industriel d’Aquaculture de 1 000 hectares permettant à des parties privées d’élever des poissons marins, des crabes et des espèces exotiques de crevettes. Cependant, en raison des protestations des écologistes et de l’opposition de la communauté, le projet a été abandonné. Ainsi, cette nouvelle notification publiée en mai 2024 est perçue par beaucoup comme une autre tentative de détourner des zones protégées à des fins industrielles.
La région de Vidataltivu, qui englobe divers écosystèmes tels que des zones humides, des mangroves et des herbiers marins, a été désignée comme une zone de conservation après de nombreuses études et recommandations d’experts en environnement et d’organismes internationaux. Cette décision visait à protéger la riche biodiversité de la région, qui comprend des espèces en danger critique telles que les dugongs et divers oiseaux migrateurs.
Cependant, l’exclusion récente de terres de cette réserve a soulevé de sérieuses préoccupations éthiques et juridiques. Les critiques soutiennent que les actions du gouvernement compromettent les principes de conservation de l’environnement et enfreignent les dispositions constitutionnelles exigeant la protection et la préservation des ressources naturelles au bénéfice du public. De plus, le rapport affirme que l’exclusion a été réalisée sans les évaluations d’impact environnemental requises et en contradiction avec le plan de gestion approuvé pour la réserve, mettant en évidence son illégalité. Le 27 juin, la Cour Suprême du Sri Lanka a suspendu cette notification par une ordonnance provisoire.
Toutefois, l’implication de hauts fonctionnaires a alimenté des allégations de corruption et d’influence indue. Si elles sont avérées, ces allégations pourraient non seulement ternir la réputation du gouvernement, mais aussi mettre en évidence les risques posés par l’influence incontrôlée des entreprises sur la politique environnementale.
Les opérations de culture de crevettes de Taprobane Seafood Ltd, déjà sous surveillance pour des violations environnementales telles que le rejet d’eaux usées non traitées, sont également accusées de mettre encore davantage en danger les écosystèmes locaux et les moyens de subsistance. Les communautés locales de pêcheurs, dont la survie dépend de la santé écologique de la région, risquent une dévastation économique potentielle en raison de la dégradation de leurs zones de pêche.
Alors que la controverse se développe, il reste à voir si les défis juridiques et les réactions publiques pousseront le gouvernement à reconsidérer sa décision et à respecter son devoir constitutionnel de protéger l’environnement. Pour plus de détails, visitez le site web de l’Alliance des Peuples pour le Droit à la Terre. Le Mouvement pour la Réforme Foncière et Agricole (MONLAR) est membre de ce réseau et figure parmi les nombreux mouvements qui s’opposent à la notification au journal officiel.
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