Position de La Via Campesina à propos de l’Année internationale de l’Agriculture familiale 2014
Communiqué de presse – La Via Campesina
Un espace afin de produire des politiques concrètes pour l’agriculture paysanne familiale
(Harare, 24 Juin 2014) La Via Campesina s’est décidée à participer à l’Année internationale de l’agriculture familiale proposée par l’ONU pour 2014, considérant qu’il s’agissait d’un espace de débat et de construction collective permettant de donner une position de force à la Souveraineté alimentaire s’appuyant sur les paysans. Partout dans le monde, les paysannes et les paysans résistent en produisant et en fournissant une alimentation saine et souveraine aux peuples, contrairement à l’industrie alimentaire dont la priorité est le profit et la spéculation, sa stratégie étant de rendre l’agriculture de plus en plus dépendante des intrants agricoles toxiques afin d’augmenter ses revenus par la vente d’herbicides, entre autres, entraînant le pillage et la contamination des biens naturels.
Nous avons été témoins d’une grave crise alimentaire qui a permis de rendre plus visible la production alimentaire paysanne et l’éradication de la faim dans l’agenda de l’ONU, qui reconnaît le rôle fondamental des paysannes et des paysans dans cette tâche ardue. Pour l’Année Internationale de l’Agriculture Familiale et dans le cadre de la Souveraineté Alimentaire, La Via Campesina cherche à faire des propositions politiques élaborées par les paysannes et les paysans.
Le terme “agriculture familiale” est très large et peut inclure presque tous les modèles ou formes d’agriculture dont les acteurs directs ne sont ni des entreprises ni des investisseurs. Cela inclut autant les petits que les grands producteurs (avec des exploitations de milliers d’hectares), ainsi que les petits producteurs dépendant totalement du secteur privé par le biais d’une agriculture par contrat ou d’autres formes d’exploitation économique, promues, entre autres, par des concepts comme “la chaîne de valeur ”. C’est pourquoi La Via Campesina défend une agriculture familiale paysanne et agroécologique, en opposition à l’agriculture à grande échelle, industrielle et toxique de l’agrobusiness qui expulse les paysans et accapare les terres dans le monde entier.
C’est pourquoi, pour cette Année internationale de l’Agriculture familiale, il est urgent de prendre des mesures concrètes et de mobiliser les volontés afin de mettre en œuvre des politiques protégeant et renforçant l’agriculture familiale paysanne. La Via Campesina défend un modèle de production des aliments pour la Souveraineté alimentaire, ce qui inclut :
- Le contrôle et l’accès aux des ressources productives comme la terre, l’eau, les semences paysannes et le crédit. Il est important d’insister sur l’urgence des Réformes agraires pour démocratiser la terre, créer des emplois directs, des logements et produire des aliments. Nous considérons que le concept de Réforme agraire intégrale ne se limite pas qu’à la distribution des terres. Nous défendons une Réforme agraire intégrale qui garantisse aux paysans tous les droits sur leurs terres, reconnaisse les droits légaux des peuples autochtones à leurs territoires, garantisse aux communautés de pêcheurs l’accès et le contrôle de leurs zone de pêche et de leurs écosystèmes et aux éleveurs nomades l’accès et le contrôle de leurs terres et zones de passage,
- La reconnaissance des droits des femmes, paysannes et agricultrices, égaux à ceux des hommes,
- Donner la priorité aux systèmes locaux de production et de commercialisation d’aliments,
- Reconnaître les droits des paysans et leur protection contre la production aux mains des grandes entreprises, la production d’agrocarburants à grande échelle,
- Un modèle de production agroécologique.
Au cours de cette année onusienne, La Via Campesina aborde également certaines menaces et exigences clés, telles que la criminalisation, la judiciarisation et la répression continue à l’encontre des paysannes et des paysans, non seulement de la part des États mais également des transnationales. Partout dans le monde, il existe des conflits liés à la terre ou aux biens naturels.
Nous exigeons des gouvernements nationaux qu’ils : mettent fin à l’accaparement des terres, de l’eau et des semences ; élaborent des politiques garantissant la Souveraineté alimentaire, la biodiversité et les semences paysannes ; améliorent l’accès à la terre et à l’eau ; reconnaissent les droits des paysannes et des paysans à la production, la reproduction et à l’échange de leurs semences traditionnelles, garantes de la biodiversité cultivée et leur autonomie ; et augmentent le soutien et les investissements publics dans la production paysanne tout en garantissant des marchés et une commercialisation équitables.
Au niveau international, nous exhortons les gouvernements d’appliquer les Directives pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, à la pêche et aux forêts ainsi que d’autres décisions clé du Comité sur la Sécurité alimentaire mondiale (CSA), d’adopter la Déclaration de l’ONU des Droits des Paysans. Qu’ils appliquent le Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture et que cessent les négociations de tout nouvel accord commercial, en particulier le TTIP (Accord de libre-échange et investissement transatlantique) et le TPP (Accord Trans-Pacifique de Coopération économique).
La Via Campesina estime qu’il faut tirer profit de cette année pour réorienter l’agriculture vers un modèle de Souveraineté alimentaire qui crée des emplois, fournit des aliments sains et respecte les biens naturels. Nous lançons un appel en vue de nouer des alliances entre la ville et la campagne permettant de sauver la dignité des paysans et leur immense contribution à la production d’aliments. Nos tables et nos champs nécessitent des ajustements politiques importants !
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