Les Droits de L’homme au centre du développement des communautés rurales
I- INTRODUCTION AU DEBAT
Certains éléments font que cette question doit être traitée en priorité par VIA CAMPESINA et de façon particulière, afin que des lignes de conduite claires et une plate-forme d’action cohérente puissent être établies. Outre ceux non moins importants qui ont apparu lors du débat de la IIIe Conférence internationale de Vía Campesina, nous attirons l’attention sur les points suivants :
1- il est reconnu que les principes fondamentaux qui régissent les droits de l’homme sont universels et doivent être soutenus et mis en oeuvre par tous les États qui les ont adoptés afin de garantir le bien-être, la dignité et la démocratie sur leur territoire. les états n’ayant pas encore ratifié les normes internationales des droits de l’homme doivent être poussés à le faire sans délai. Qu’il s’agisse de la stratégie ou des actions de VIA CAMPESINA, le thème des droits de l’homme se retrouve dans tous les autres domaines retenus par VIA CAMPESINA, à savoir :
Souveraineté alimentaire et commerce ;
Réforme agraire, financement, technologie et ressources naturelles ;
Biodiversité, ressources génétiques et environnement ;
Rôle des femmes paysannes au sein de VIA CAMPESINA et les politiques en ce qui concerne la discrimination sexuelle contre la mondialisation ;
Agriculture durable. 1- Le sujet a été abordé depuis l’angle dynamique de la défense, la promotion et l’applicabilité des droits civils et politiques, dont la violation est un aspect majeur qui affecte la population rurale. Les massacres, disparitions forcées, détentions arbitraires, déplacements forcés, exils, tortures et sévices, la criminalisation de la revendication et de la protestation sociales sont autant de drames vécus par des millions de paysans ainsi que des populations indigènes et noires du monde entier. Cette situation est encore plus grave dans les pays déchirés par des conflits armés. Il est urgent que des lois régissant le statut international des droits de l’homme soient adoptées et respectées. 2- Les statistiques mondiales des inégalités (sociales, économiques, sexuelles, politiques et culturelles) montrent que dans le monde actuel, les paysans sont les plus touchés. 3- Le sujet a été développé à partir d’actions spécifiques, mais sans aucune stratégie clairement définie. 4- Il existe aujourd’hui, au niveau international, toute une gamme d’instruments juridiques pour la défense, la promotion et l’applicabilité de différents aspects des droits de l’homme. Cependant les gouvernements refusent de les mettre en pratique. 5- Il est possible de trouver un environnement international plus favorable au développement de campagnes et autres actions plus énergiques sur ce thème. 6- Certains problèmes, au sein de VIA CAMPESINA et de ses organisations, pourraient également relever du non-respect des droits de l’homme. Un exemple est la discrimination à l’égard des femmes paysannes pour l’accès aux possibilités de développement ou la participation politique effective au sein de leurs organisations locales ou à d’autres niveaux, y compris à VIA CAMPESINA.
II- TRAVAUX CONCRETS EFFECTUES ANTERIEUREMENT PAR VIA CAMPESINA SUR CE SUJET
Vía Campesina a en fait concentré ses actions autour de trois principaux axes :
1- La solidarité contre les actions violentes menées à l’encontre des organisations de VIA CAMPESINA ou de leurs délégués. Nous renforçons l’action au Brésil, en Colombie et en Bolivie concernant la défense, la promotion et l’applicabilité des droits civils et politiques. 2- La Campagne mondiale pour la réforme agraire en collaboration avec FIAN, une organisation internationale très connue au sein de VIA CAMPESINA. 3- La définition des concepts, stratégies thématiques et actions concrètes concernant les droits de l’homme – l’un des cinq thèmes prioritaires dans l’action stratégique de VIA CAMPESINA.
Il manque à ces trois orientations un cadre stratégique pour clarifier et mieux cibler les travaux.
III- DOMAINES DE TRAVAIL
1- VIA CAMPESINA considérera comme droits de l’homme – inaliénables et imprescriptibles – tous les droits inscrits dans les principales déclarations et conventions internationales qui concernent les problèmes liés à l’appartenance sociale, sexuelle, politique, économique et culturelle auxquels sont confrontées les communautés rurales du monde entier.
VIA CAMPESINA va également adopter des propositions d’actions concernant les nouveaux instruments juridiques internationaux relatifs aux droits de l’homme. En tant qu’organisation représentant les intérêts des paysans et petits exploitants au niveau international, il est impératif que vía campesina effectue des travaux de rédaction et mène des actions de sensibilisation et de propagande concernant une législation, à adopter au niveau international, qui protège les droits des paysans et petits exploitants. C’est important non seulement pour faire pression en faveur d’une meilleure protection des droits des paysans et petits exploitants, mais également comme outil de propagande pour mieux faire connaître les violations des droits de l’homme perpétrées contre cette catégorie de la population.
VIA CAMPESINA soutiendra les actions de justice alternative pour les situations particulières telles que les crimes contre l’humanité commis vis-à-vis de la population rurale. Les jugements éthiques et moraux des tribunaux internationaux pour délits d’opinion ont, dans de nombreux cas, conduit les États à rendre justice.
2- En résumé, nous proposons que VIA CAMPESINA se concentre, dans le domaine DROITS DE L’HOMME, sur le respect, la promotion et l’applicabilité des Droits Economiques, Sociales et Culturels comme des Droits Civils et Politiques, y compris ceux déjà en vigueur et ceux pas encore énoncés.
Nous continuerons à travailler sur les autres orientations en matière de droits de l’homme dans le cadre des domaines de l’action stratégique de VIA CAMPESINA, en faisant en sorte que des dispositifs permettant une étroite coordination entre la commission des droits de l’homme et d’autres commissions soient mis en place. Il faut éviter la situation dans laquelle une commission « A » croit que la commission « B » s’occupe d’un aspect particulier des violations des droits de l’homme à l’encontre des paysans et petits exploitants, alors que ce n’est pas le cas en réalité. Un groupe inter-commissions pourrait peut-être être créé pour traiter des questions des droits de l’homme. Il n’est toujours pas évident de comprendre pourquoi le travail de la commission des droits de l’homme n’est pas de s’occuper de toutes les questions y afférentes.
IV- ORIENTATIONS
1- Définir les pays prioritaires, selon les critères fixés par la Commission Coordinateur Internationale. Nous continuerons à prêter attention au Brésil, à la Colombie et à la Bolivie. comme convenu lors de la troisième conférence de vía campesina, l’indonésie, le sri lanka et les philippines seront ajoutés aux pays ci-dessus en tant que zones particulièrement préoccupantes. il ne saurait y avoir de limitation du nombre de pays admis dans cette catégorie. 2- Lancer un programme de documentation, sous forme de base de données, qui montre les types et la nature systématique des violations des droits de l’homme commises à l’encontre des paysans et petits exploitants, en insistant en particulier sur l’augmentation des violations des droits de l’homme et des conflits liés à la propriété foncière, ainsi que de la tendance à criminaliser la lutte des paysans et petits exploitants. cela est important pour mettre au point, en réponse aux violations des droits de l’homme commises à l’encontre des paysans et petits exploitants, une stratégie coordonnée qui ne soit pas seulement basée sur le cas par cas mais qui fasse partie d’une stratégie/campagne globale de VIA CAMPESINA. 3- Etablir des réseaux avec des organisations des droits de l’homme existantes qui travaillent déjà avec des instruments et dispositifs en place, par exemple à la commission et la sous-commission des droits de l’homme aux nations unies. cela est important pour acquérir une expertise dans ce domaine ainsi que pour alléger la charge de via campesina. 4- Préparer une nouvelle législation sur les droits de l’homme qui protège les droits des paysans et petits exploitants, et mener des actions militantes et de sensibilisation à cet égard. il est important que ce soit une organisation comme VIA CAMPESINA, dont les membres sont des paysans et petits exploitants du monde entier, qui tire profit de l’expérience vécue et de son expertise pour préparer une législation qui soit véritablement adaptée au public des paysans et petits exploitants, comme c’est le cas pour les droits des travailleurs dans la convention de l’oit. l’agriculture est plus qu’une industrie, c’est un mode de vie. c’est la culture, l’histoire et le moyen de subsistence de la majorité des habitants de la planète. les paysans et petits exploitants sont les gardiens légitimes d’un environnement riche, varié et propre, et ils devraient en tant que tels faire l’objet d’une législation spéciale qui préserve et protége leurs droits. 5- Constituer un réseau d’urgence ou un groupe de travail spécial au sein de vía campesina, en collaboration avec d’autres organisations stratégiques si nécessaire, afin de réagir immédiatement aux cas de violations des droits de l’homme commis à l’encontre des paysans et petits exploitants. 6- Assurer une étroite coordination avec d’autres commissions de VIA CAMPESINA sur les questions des droits de l’homme et leurs violations. il devra, par exemple, être admis que l’on ne pourra établir de véritables droits de l’homme sans une vraie réforme agraire. les politiques néolibérales et de libre-échange ont entraîné une hausse du nombre de violations des droits de l’homme à l’encontre des paysans et petits exploitants. 7- Promouvoir, au niveau international, une campagne choc sur le droit des sociétés civiles du Nord et du Sud à participer aux processus et forums importants où sont définies les principales politiques de la mondialisation. 8- Soutenir les efforts mis en œuvre pour trouver une solution politique aux conflits armés, en recourant à la négociation avec participation autonome et indépendante de la population civile. 9- Mettre sur pied, au sein des mouvements, des actions qui permettent une véritable participation des bases sociales des organisations aux instances dirigeantes ainsi qu’une vraie participation des femmes rurales dans la structure des organisations. Pour ce faire, nous proposons de créer un groupe chargé des questions de discrimination positive et d’établir un CODE DE CONDUITE définissant les critères de base et compromis. 10- Définir des critères, contenus d’actions et indicateurs qui orientent les travaux de VIA CAMPESINA dans le domaine des droits de l’homme.