La souveraineté alimentaire du Kenya est menacée par la crise de la dette et les accords de libre-échange
À l’approche de la 13e Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) prévue pour le 26 février, les mouvements paysans internationaux mettent en avant le lien critique entre ces accords commerciaux et les crises de la dette dans divers pays, mettant en danger la capacité des populations à contrôler leur production alimentaire.
Dans un extrait audio d’un séminaire sur les Crises de la Dette, David Otieno de la Ligue des Paysans Kényans souligne cette préoccupation, mettant en lumière plusieurs accords de libre-échange qui facilitent désormais l’importation bon marché de pesticides, d’œufs et de sucre.
En janvier 2024, la Ligue des Paysans Kényans a également exprimé son opposition à l’Accord de Partenariat Économique (APE) entre l’Union Européenne et le Kenya. En signant une lettre avec d’autres membres de la société civile adressée aux parlementaires européens, l’organisation soutient que l’utilisation des ressources agricoles, telles que la terre et l’eau, à des fins d’exportation compromet la capacité du Kenya à prioriser une agriculture visant à réduire sa dépendance vis-à-vis des importations telles que les céréales.
La lettre souligne que l’APE avec la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE), sur laquelle repose l’accord entre l’UE et le Kenya, n’a pas été ratifié en 2016. Les États membres de la CAE ont reconnu que leurs industries locales ne pouvaient pas rivaliser avec les entreprises de l’UE, enfermant la région dans le rôle de fournisseur de produits primaires à faible valeur ajoutée. Des estimations indiquent une diminution du bien-être au sein de la CAE, tandis que l’UE enregistrerait un gain de 212 millions de dollars.
Le texte explique également que, en tant que membre de l’union douanière de la CAE, le Kenya, en appliquant l’accord, faciliterait l’entrée de produits européens dans tous les pays de la CAE. Les règles d’origine et les sauvegardes introduites par les partenaires dans le texte sont difficiles à faire respecter, conduisant à un afflux de produits européens.
Par exemple, la Côte d’Ivoire et le Ghana, ayant mis en place un APE intérimaire avec l’UE, ont vu arriver de la poudre de lait, affectant la capacité de pays comme le Burkina Faso, le Nigéria et le Sénégal à satisfaire leurs besoins en lait par la production nationale. La pression concurrentielle résultant de la poudre de lait bon marché mine leur capacité à assurer la souveraineté alimentaire, avec des baisses de 80 % à 69 % pour le Burkina Faso, de 41 % à 21 % pour le Nigéria et de 33 % à 21 % pour le Sénégal au cours des deux dernières décennies.
Vous pouvez lire le texte complet de la lettre ici.