COP 27: Appel à l’action de La Via Campesina pour la 27ème conférence annuelle de l’ONU sur le climat

(31octobre 2022) Année après année, les conférences des Parties (COP) de l’ONU sur le climat se succèdent, mais la crise climatique mondiale ne fait que s’aggraver. Causé en grande partie par l’agrobusiness et le système capitaliste destructeur qu’elle alimente, la crise actuelle est le résultat direct d’un système économique qui exploite toute forme de vie sans reconnaître aucune limite vis à vis de la nature. Les systèmes complexes et les cycles de maintien de la vie de la Terre-Mère sont brisés. Et la pandémie dévastatrice de COVID-19 et l’inaccessibilité des soins de santé pour de nombreuses personnes, démontre à quel point le capitalisme peut être cruel lorsqu’il s’agit de répartir la douleur, la souffrance et les pertes causées par la destruction de la nature. Que ce soit au Pakistan, en Palestine ou à Porto Rico — pour n’en citer que quelques-uns — la menace autrefois lointaine des « changements climatiques » se manifeste aujourd’hui par des vagues successives « d’événements météorologiques catastrophiques » qui font des tragédies liées au climat une part trop fréquente de la vie quotidienne des gens. Des sécheresses aux inondations, en passant par des feux de forêt et des ouragans, ces manifestations extrêmes menacent la vie et la  souveraineté alimentaire des peuples, qui réclament de véritables solutions pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 %. Comme si cela ne suffisait pas, les personnes assoiffées de pouvoir organisent les guerres, les occupations et les sanctions sans considération pour les droits à l’alimentation, à la santé, à la paix et à l’autodétermination reconnus par l’ONU, et encore moins pour le droit humain désormais universel à «un « environnement propre, sain et durable. » (Assemblée Générale des Nations Unies, 2022). En outre, le rapport SOFI (2022) sur l’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde indique que la vulnérabilité et les événements climatiques extrêmes accentuent l’augmentation des personnes souffrant de la faim, de la pauvreté et des inégalités.

Dans le cadre de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et de ses COP annuelles sur le climat, les sociétés transnationales (STN) utilisent le contrôle qu’elles exercent sur une majorité de les gouvernements nationaux et les institutions multilatérales pour commercialiser la crise, nier que le capitalisme des combustibles fossiles y est pour quelque chose et limiter toute possibilité réelle de changement transformateur. Bien que le système alimentaire des multinationales soit responsable de plus de 50 % de l’ensemble des gaz à effet de serre (GES), les Bayer-Monsanto de ce monde n’offrent rien de plus que des propositions avides de profits présentées sous la forme de programmes honteux de type « zéro émission nette. » Au lieu d’une réduction réelle, urgente et nécessaire des émissions — dont la responsabilité principale incombe aux élites des émetteurs historiques tels que les États-Unis, l’Europe, le Canada et l’Australie — les fausses solutions des STN offrent un laissez-passer au noyau colonial dominant tout en menant une attaque mondiale contre les communautés, les moyens de subsistance et les territoires ruraux. Les soi-disant « solutions fondées sur la nature » (NBS) telles que REDD et REDD+, l’ « agriculture carbone » et d’autres systèmes d’échange fondés sur le marché, ainsi que la prise de contrôle de l’agriculture par les entreprises grâce à le brevetage, la « numérisation », « l’intensification durable » et « l’intelligence climatique » sont autant de grandes victoires pour l’agrobusiness, mais de terribles pertes pour les paysan·nes, les peuples autochtones, les pêcheur·euses, les habitant·es des forêts et les autres personnes en première ligne de la crise climatique mondiale. Et lorsque le grand canular du « net zéro » ne parvient pas à calmer le climat, les STN promettent que la géo-ingénierie à très haut risque sauvera la situation (ou du moins leurs marges bénéficiaires). C’est la norme à chaque COP sur le climat, et la 27e Conférence annuelle des parties (COP27) ne devrait pas être différente.

La COP de cette année, censée être « la COP de l’Afrique, » se déroulera dans l’enclave élitiste et artificielle de Sharm el Sheikh, en Égypte. Loin des luttes constantes des peuples africains et arabes pour l’autodétermination, la COP27 laisse très peu de place aux communautés organisées pour dire la vérité face au pouvoir des multinationales. C’est pourquoi un grand nombre de nos organisations sœurs du Collectif africain pour la justice climatique (ACJC) ont organisé la Contre COP des peuples africains pour exiger de vraies solutions enracinées dans la justice climatique, une priorité accordée aux personnes et à la planète, et la fin du contrôle de la CCNUCC par les STN. Comme le stipule clairement la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysan·nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP) : « Les États prendront toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les acteurs non étatiques qu’ils sont à même de réglementer, notamment les particuliers et les organismes privés, ainsi que les sociétés transnationales et les autres entreprises commerciales, respectent et renforcent les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (et) prendront des mesures appropriées pour faire en sorte que les paysans et les autres personnes travaillant dans les zones rurales jouissent, sans discrimination, d’un environnement sûr, propre et sain. »

C’est précisément en raison de ce contexte que La Vía Campesina sera présente à la COP27. Les délégué·es de nos organisations membres feront entendre leurs voix, leurs traditions, leurs expériences et leurs solutions. Nous continuerons de promouvoir, de pratiquer et d’élever la souveraineté alimentaire comme le droit des peuples à une alimentation saine et culturellement appropriée, produite par des méthodes écologiquement saines et durables, ainsi que le droit de définir nos systèmes alimentaires et agricoles. Nous expliquerons une fois de plus que les paysan·nes, à travers des pratiques et des territoires agroécologiques, cultivent plus de 70 % de la nourriture produite dans le monde sur moins de 30 % des terres arables. Nous soulignerons que l’agroécologie est une voie durable basée sur des siècles d’expérience et de preuves réelles accumulées — c’est une science, un mouvement social et un style de vie pratiqué par des millions de personnes à travers le monde grâce au travail significatif, à la coopération, à des stratégies et à l’organisation. Nous amplifierons et partagerons l’UNDROP, un instrument juridique international que nous avons contribué à créer et qui défend les droits des peuples sur leurs territoires, leurs semences, leurs eaux et leurs forêts et qui promeut une manière plus durable d’être et de vivre. Nous serons solidaires de toutes celles et de tous ceux qui luttent pour les droits collectifs et réitérerons la nécessité de « responsabilités communes, mais différenciées » entre les États — y compris un Fonds vert pour le climat dynamique, libre de toute influence du Fonds monétaire international (FMI) ou de la Banque mondiale (BM), dépourvu de toutes les impositions néolibérales qui ne servent qu’à exploiter davantage les gens et la planète, et entièrement financé par des réparations climatiques pour les héritages coloniaux du passé et du présent. Nous sommes solidaires et soutenons nos allié·es du mouvement pour la justice climatique qui exigent des réparations climatiques justes, et pas seulement des ” financements climatiques “. Enfin, nous serons à la COP27 pour continuer d’étendre notre influence en construisant la solidarité, l’action et les stratégies communes avec les organisations de base, les alliances et les mouvements sociaux du monde entier qui luttent pour le climat et la justice sociale.

Alors que une majorité de les gouvernements nationaux et les institutions multilatérales proposent des solutions capitalistes qui continuent à échouer dans la lutte contre la crise climatique, nous, la voix organisée de plus de 200 millions de paysan·nes, d’autochtones, de travailleur·euses sans terre, de pêcheur·euses, d’éleveur·euses, de travailleur·euses agricoles migrant·es, de petit·es et moyen·nes agriculteur·trices, de militant·es pour la souveraineté alimentaire, de membres des communautés rurales, côtières et urbaines, de femmes, de jeunes et de personnes de diverses identités de genre de La Via Campesina, en convergence avec une diversité de mouvements pour la justice climatique, réitérons ici et maintenant nos véritables solutions: LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE REFROIDIT LA PLANÈTE. Réalisons-la avec l’agroécologie et les droits paysans pour assurer une Transition Juste ancrée dans le pouvoir des peuples, le bien-être écologique et social, et la solidarité au plan local, régional et international. Ensemble, dans la lutte, nous gagnerons !

DROITS ET AGROÉCOLOGIE PAYSANNE POUR UNE TRANSITION JUSTE

GLOBALISONS LA LUTTE !

GLOBALISONS L’ESPOIR !


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