Suisse : Pas d’accapareurs de Terres, ni à Genève ni ailleurs
Le 20 juin 2010 une conférence organisée par Jetfin Agro a eu lieu à Genève. Des associations avaient dénoncé le soutien du Canton de Genève. Une autre conférence – organisée cette fois par Global AGInvesting Europe s’est déroulée le 9 novembre 2010. Une large coordination s’est constituée afin de protester contre cet événement, dénoncer les pratiques d’accaparement des terres agricoles, et diffuser des informations sur le phénomène d’accaparement et la mondialisation de l’agro-industrie destructive.
Pour la 2ème année consécutive, la Jetfin Agro conference aura lieu au Grand Hôtel Kempinski de Genève, le mardi 7 juin 2011, avec le mêmes objectif : promouvoir les stratégies d’investissements agricoles! En d’autres termes: comment piller les terres des paysans d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique Latine.
Nous revendiquons:
1. Que cesse l’accaparement des terres et de l’eau ; des réformes agraires qui permettent l’accès à la terre au plus grand nombre doivent être promues.
2. Que la spéculation sur les matières premières agricoles soit supprimée; nous nous prononçons en faveur d’une réglementation efficace et au service des populations.et non des multinationales.
3. Que les fonds de pension se retirent de ce type d’investissements pour s’orienter vers des fonds éthiques.
4. Que les autorités genevoises retirent leur soutien direct ou indirect à ce genre de rencontres entre accapareurs.
5. La priorité à l’alimentation: la production d’énergie (agrocarburants) doit être un objectif subsidiaire et assujetti à des critères de durabilité sociale et environnementale.
6. La priorité à l’agriculture paysanne familiale et durable seule à même de relever le défi alimentaire et de reconnaître la souveraineté alimentaire comme droit définissant un nouveau cadre des marchés agro-alimentaires.
7. La reconnaissance des droits ancestraux des communautés et petits paysans à la terre qu’ils-elles travaillent même s’ils n’ont pas de titres de propriété.
Nous serons de nouveau présents pour dénoncer cette conférence et la participation de l’Etat de Genève en tant que partenaire institutionnel. Nous dénonçerons également la participation du fond de pension du CERN en tant qu’intervenant lors de cette conférence.
Venez manifester nombreux! le mardi 7 juin 2011 à 12h00 devant le Grand Hôtel Kempinski (quai du Mont-Blanc 19)
Amenez vos casseroles pour faire du bruit !!!
Soutenu par: Uniterre, FIAN, l’autre syndicat, Unia, SiT, UITA, CADTM, CETIM, Coordination Climat et Justice Sociale, Cotmec, plateforme pour une agriculture socialement durable, solidaritéS, StopOGM, United Black Sheep, ATTAC-Suisse, Assoc. 25 avril, coopérative Longo maï, Greenpeace-GE,…
Qu’est-ce que l’accaparement des terres ?
La terre est essentielle à la subsistance, à la sécurité alimentaire et à l’identité de millions de personnes dans les pays en développement dépendant directement de I’agriculture. Cependant, depuis quelques années, on assiste à un phénomène d’accaparement des terres: certains Etats ainsi que des investisseurs privés louent ou achètent des dizaines de millions d’hectares de terres agricoles en Asie, Afrique et Amérique Latine afin de produire de la nourriture ou des agrocarburants destinés aux pays acheteurs.
Exemples: Au Soudan, on cultive du blé sur 1,5 millions d’hectares destinés non pas au peuple soudanais mais à I’ Arabie Saoudite. On fait aussi pousser du sorgho, aliment de base au Soudan, qui sert toutefois à nourrir les chameaux des Emirats arabes unis. L’Ethiopie a déjà clôturé trois millions d’hectares de terres en vue de les louer à des investisseurs étrangers ce qui représente une surface équivalente à la Belgique.
Dans ce pays africain, 13 millions de personnes sont victimes de la faim et de sous-alimentation et dépendent de l’aide alimentaire. La Banque Mondiale estime que les surfaces agricoles négociées, louées ou vendues depuis 2006 en Afrique, en Amérique latine et en Asie s’élèvent à quelque 50 millions d’hectares. Cela correspond à la moitié de l’ensemble des terres arables en Chine ou encore à la surface combinée des terres arables existantes en France, au Royaume-Uni, en Allemagne et en ltalie.
Qui sont les acteurs des accaparements de terres?
Des gouvernements: après la flambée des prix des aliments en 2008, des gouvernements de pays tributaires d’importations ont commencé à considérer la culture vivrière à l’étranger comme une nouvelle stratégie permettant de garantir la sécurité alimentaire de leur pays. Le Japon, la Chine, I’Inde ou I’Arabie Saoudite, entre autres, ont pris conscience de I’impossibilité de couvrir leur besoins croissants de denrées alimentaires ou de fourrage sur le marché international.
Des fonds spéculatifs: en pleine crise financière et hypothécaire, l’exploitation des terres a attiré les fonds spéculatifs ainsi que des banques à la recherche de nouvelles possibilités de placements sûrs avec un bon potentiel de rendement.
Les fabricants de machines agricoles ainsi que de nombreuses entreprises semencières et chimiques escomptent aussi des revenus plus élevés grâce à la culture industrielle sur d’énormes surfaces agricoles.
L’industrie des agro-carburants d’Europe a déjà acquis, ou sollicité, presque 4 millions d’hectares de terres en Afrique. Vu la quasi-inexistence de registres fonciers en Afrique et étant donné que les terres appartiennent à l’Etat, les marchés sont conclus en sous-main entre les acteurs de ces accaparements et des gouvernements plus ou moins corrompus. Dans certains cas, on expulse les paysans de leurs terres ancestrales comme cela s’est produit au Kenya.
Conséquences
Le phénomène d’accaparement des terres ne fait qu’exacerber le problème de la faim. Il crée ou favorise des structures productives inadéquates pour la culture vivrière, et fragilise I’agriculture familiale. De plus, les terres accaparées n’offrent que peu de possibilités d’emplois pour la population locale car les exploitations sont fortement mécanisées et parfois cultivées par une main-d’œuvre étrangère. Ces cultures sont aussi une menace pour l’environnement par l’utilisation intensive de pesticides et, fréquemment, de semences génétiquement modifiées et l’utilisation excessive d’eau. Les femmes sont les premières victimes car elles produisent une grande partie de tous les aliments de base à l’échelle mondiale alors que la plupart d’entre elles ne possèdent pas de titres de propriété.
En ayant recours à I’accaparement des terres, les Etats ou les investisseurs mettent en péril les droits humains des populations concernées, dont le droit à l’alimentation et à l’eau, ainsi que la souveraineté alimentaire.
En Suisse, ce sont surtout des banques et des fonds qui sont impliqués dans ces projets d’accaparement des terres. Ainsi, le Crédit Suisse et l’UBS ont participé en 2009 à l’émission d’actions pour le compte de Golden Agri-Resources, le plus grand producteur d’huile de palme du monde coté en Bourse. La Suisse abrite aussi un grand nombre de fonds qui ciblent leurs investissements sur l’agriculture et en partie sur l’achat de terres. Sarasin et Pictet, deux grandes banques privées, proposent des fonds centrés sur l’agriculture. Plusieurs fonds suisses, classiques ou spéculatifs, investissent dans l’agriculture, dont par exemple Global Agricap à Zurich, GAIA World Agri Fund à Genève. Addax Bionergy, basée à Genève, loue 15’000 hectares en Sierra Leone où plus de la moitié de la population souffre de sous- alimentation.
N.B. Une grande partie des informations présentées ici sont cités de la brochure de Pain pour le prochain et Action de Carême (Collection Repères 1/2010, L’accaparement des terres, La course aux terres aggrave la faim dans le monde)