Le secteur privé prend le contrôle sur la COP19 et le climat
Mettons fin à l’emprise du secteur privé sur le climat et à l’expansion des marchés carbone !
Depuis presque 20 ans, les politiques multilatérales sur le climat ont servi à créer des mécanismes financiers rentables qui font perdurer des systèmes dépendants des combustibles fossiles responsables de la crise climatique. Du 11 au 22 novembre à Varsovie, en Pologne, la 19e Conférence des Parties (COP19) de la Convention cadre des Nations-unies sur les changements climatiques (CCNUCC) ne fera pas exception. L’agenda de l’Union européenne (UE) pour cette COP19 vise à la fois à étendre les mécanismes de marché carbone et trouver d’autres moyens de soutenir un système industriel et financier dépendant du charbon, du pétrole et du gaz, qui est confronté à une crise multidimensionnelle.
Le programme de l’UE pour la COP19 : plus de marchés carbone
Afin d’accroître la portée des marchés carbone, l’UE fera part de son soutien continu à un ensemble de politiques qui ont échoué et qui ont été rejetées par plus de 140 organisations et mouvements sociaux du monde entieri. L’UE, la Norvège, l’Australie, les Etats-Unis, et une foule d’alliés du secteur privé veulent créer plus de marchés de l’environnement dans le cadre de la Convention sur le climat afin de compléter le marché carbone européen, qui est un désastreii. Les négociations autour de Nouveaux Mécanismes de Marché (NMM) permettraient d’élargir la portée des mécanismes de compensation tels que le Mécanisme de Développement Propre (MDP). En outre, les négociations intitulées Framework for Various Approaches (FVA) impliqueraient un accord avalisant le commerce international de titres provenant des différents marchés du carbone régionaux, nationaux et locaux existants afin de respecter les engagements découlant de la Convention.
Les décisions de 2012 de l’ONU, qui prévoient des principes directeurs pour les NMM, soulèvent un certain nombre de problèmes. Ainsi en est-il de l’extension des marchés du carbone visant à inclure les dispositifs portant sur les émissions liées aux usages de la forêt et du sol, tels que le problématique mécanisme REDD + (Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts)iii. La structure du dispositif NMM reste indécis. Cependant, l’UE promeut un NMM qui couvre de larges secteurs des économies pays du Sud. Cela reviendrait à multiplier les sévères effets que le MDP a déjà engendré sur les populationsiv des concernées, l’environnement et le climat.
En outre, le FVA permettrait que des droits à polluer provenant de divers marchés nationaux, régionaux ou locaux puissent être échangés dans le cadre de la Convention climat. Des permis à polluer créés par des systèmes fonctionnant selon des règles très différentes deviendraient ainsi négociables à une plus grande échelle dans l’optique d’un « marché mondial du carbone». En conséquence, l’UE poursuit un objectif visant à étendre des marchés qui ont non seulement échoué à apporter une solution à la crise climatique, mais qui en plus bénéficient aux industries qui sont responsables de l’aggravation des dérèglements climatiques.
Les pollueurs amplifient leur emprise sur la convention climat
Non seulement, la COP19 risque d’en rajouter au catastrophique marché carbone de l’UE, mais elle étend également l’emprise du secteur privé sur les négociations climat, en lui fournissant une place à l’intérieur même du cœur des négociations. Le ministre de l’Environnement polonais, Marcin Korolec, chargé d’organiser ces négociations, a ainsi affirmer que «pour la première fois en 19 ans, depuis que les négociations sur le climat existent, les représentants du secteur privé mondial en feront partie capitulation face à l’emprise du secteur privé favorise une tendance dangereuse positionnant ouvertement les»v. Cette entreprises au coeur du processus de prise de décision et elle garantit en outre que les décisions politiques, orientées par le secteur privé, bénéficieront aux pollueurs plutôt que de les forcer à prendre des mesures efficaces.
Pour aggraver les choses, les entreprises sélectionnées sont celles qui ont quelques-uns des antécédents les plus préjudiciablesvi. Quelques exemples: ArcelorMittal, le géant de l’acier qui a massivement profité des marchés du carbone tout en causant des dommages aux populations vulnérablesvii; Alstom qui prévoit de construire la plus grande centrale au charbon en Pologne Pologne, avec des investissements dans le charbon, le gaz de schiste et nucléaire; PGE, la plus grande entreprise d’énergie de la compagnie pétrolière LOTOS SA, qui est impliquée dans le gaz de schiste et mène un groupe de pression en la matière géants de l’industrie automobile tels que BMW, qui ont activement fait du lobbying contre les réductionsviii; et des d’émissions de CO2 pour les voituresix.
Forte présence du lobby du charbon à la COP19.
L’industrie du charbon, une des sources d’énergie les plus polluantes contribuant à la crise climatique, sera fortement présente à la COP19. Le ministère polonais de l’Economie et l’Association mondiale du charbon (comprenant des membres tels que Rio Tinto, Katowice et BHP Billiton) ont publié un communiqué appelant l’ONU et les banques de développement à s’engager vers une utilisation accrue du charbon et des technologies utilisant le charbonx. En plus d’inviter les banques de développement à soutenir les pays du Sud pour accéder aux nouvelles technologies charbon, ils organisent un «Sommet mondial sur le charbon et le climat » pendant les négociationsxi.
La COP19 s’annonce comme un moment culminant de l’emprise du secteur privé sur les négociations de l’ONU. Avec des gouvernements tissant des partenariats avec certains des plus grands responsables de la crise climatique, la COP19 va accroître la capacité des pollueurs à tirer profit de la situation au détriment du climat. Les marchés du carbone ont démontré leur absolue incapacité à réduire les émissions de gaz à effets de serre à la source et à promouvoir une transition juste délaissant les combustibles fossiles, tous deux pourtant nécessaires pour réduire les impacts du changement climatique.
Nous, les organisations signataires, dénonçons les gouvernements, les Nations Unies et leurs alliés financiers qui cèdent au pouvoir des entreprises et de leurs groupes de pression au lieu de se lever face à eux et de rendre possible une transition juste vers une société post-fossile. Il est temps de mettre fin au marché carbone européen et aux autres tentatives visant à marchandiser la nature. Il est temps de laisser les combustibles fossiles et les minerais dans le sol. Il est temps d’entamer une véritable transition vers des solutions alternatives justes et menées par les populations.
i Déclaration « Il est temps de mettre fin au marché carbone européen »
ii EU ETS myth busting: Why it can’t be reformed and shouldn’t be replicated, www.fern.org/EUETSmythbusting ; EU Emissions Trading System: failing at the third attempt http://corporateeurope.org/news/eu-ets-failing-third-attempt ; Carbon Trading – how it works and why it fails, www.carbontradewatch.org/publications/carbon-trading-how-it-works-and-why-it-fails.html ; Trading carbon – how it works and why it is controversial, www.fern.org/tradingcarbon ; Energy Security For Whom? For What? www.thecornerhouse.org.uk/resource/energy-security- whom-what ; Green is the Color of Money: The EU ETS Failure as a Model for the “green economy” www.carbontradewatch.org/publications/green-is-the-color-of-money-the-eu-ets-faliure-as-a-model-for-the-green-economy.html
iii Pourplusd’informationssurREDD+voir:http://noredd.makenoise.org/
iv Une décision clef en cours de discussion concerne la possibilité de créer un NMM basé sur une approche par projets, comme le MDP, ou une approche par secteur. De l’autre côté, la Bolivie a appelé à un moratoire sur la mise en œuvre de tout nouveau mécanisme de marché dans le cadre de la Convention, considérant que les marchés du carbone instituent un nouveau droit international – le droit de polluer – et entre en contradiction avec l’intégrité environnementale et et avec les éléments scientifiques élémentaires sur le changement climatique. Voir : www.fern.org/sites/fern.org/files/fern-comment/nmmpaper_internet-1.pdf
v Dirty Business in Warsaw : http://corporateeurope.org/it/node/1530
vi Les entreprises partenaires de la COP19 sont : ArcelorMittal Poland SA, ALSTOM Power Pty Ltd, BMW Group Poland, Emirates, EUROPRESEE Poland Ltd., General Motors Poland Ltd., Grupa LOTOS SA, International Paper-Kwidzyn . z oo, Kaspersky Lab Poland, LeasePlan Fleet Management (Poland), PGE Polish Energy Group, LOT Polish Airlines (à la mi-octobre, LOT Polish Airlines a été retirée de la liste des partenaires dans certains des articles du site officiel COP19 du gouvernement polonais)
vii www.carbonmarketdata.com/cmd/publications/EU%20ETS%202012%20Company%20Rankings%20-%204%20June%202013.pdf
viii http://www.greens-efa.eu/astroturfing-in-the-ep-8588.html
ix http://www.transportenvironment.org/news/%E2%80%98bad-blood%E2%80%99-over-cars-co2
x www.worldcoal.org/extract/wca-launches-the-warsaw-communique-call-to-action-2-2698/
xi http://scc.com.pl/konferencje/en/cct/