Brésil : Les femmes du Mouvement des sans Terre occupent Nestlé contre la privatisation de l’eau
(São Lourenço , le 20 mars 2018) En début de semaine, le siège de la multinationale Nestlé à São Lourenço, dans la région méridionale de Minas Gerais, était occupé par 600 femmes du mouvement des sans terre dans le prolongement des mobilisations ayant eu lieu au Brésil à l’occasion du 8 mars. Par cette occupation, elles voulaient dénoncer la privatisation des eaux par les entreprises internationales, privatisation fortement encouragée par le gouvernement issu du coup d’Etat de Michel Temer. Elles voulaient mettre en garde contre les principaux accords qui se prennent en ce moment à l’occasion du Forum mondial de l’eau à Brasilia.
“Imaginez être forcé d’acheter des bouteilles d’eau toute la journée pour étancher votre soif. Personne ne supporterait cela. Pourtant c’est ce que veulent les entreprises qui se réunissent en ce moment même dans ce Forum “, déclare Maria Gomes de Oliveira, de la direction du MST. “Il faut beaucoup de culot pour organiser un forum international dans le but de commercialiser nos réserves d’eau. Ils ne se réunissent pas pour discuter de la gestion de quoi que ce soit, ils font la promotion d’une véritable vente aux enchères pour vendre le pays au “prix de la banane”, dit la leader.
En janvier 2018, Michel Temer et Paul Bulcke, Président de Nestlé, se sont rencontrés pour discuter de l’exploitation de l’aquifère Guarani. La réserve conserne quatre pays (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay). Après la victoire des conservateurs en Argentine et les coups d’Etat au Paraguay et au Brésil, seul l’Uruguay peut encore s’opposer à la privatisation.
Extraction criminelle
La société Nestlé, qui contrôle 10,5% du marché mondial de l’eau, s’est établie dans l’état de Minas Gerais en 1994, date à laquelle elle a acheté les sources et le Parc de las Aguas de São Lourenço. Depuis 1997, la population locale dénonce l’exploitation de l’eau dans la région. Des eaux qui, avant d’être privatisées, étaient largement utilisées pour des traitements médicinaux. En plus de la réduction du débit, il y a un changement dans le goût de l’eau, car l’exploitation extrait de l’eau une partie de ses sels minéraux.
Le processus d’embouteillage met sur le marché deux marques : “São Lourenço” et “Pure Life”. « Pure Life » a été commercialisée sans licence d’État de 1999 à 2004, date à laquelle le gouvernement d’Aécio Neves (PSDB) a accordé une autorisation de prélèvement à la société. Une action civile publique contre Nestlé a identifié qu’en plus d’avoir prélevé de l’eau sans autorisation – entraînant l’assèchement de la source riche en magnésium, l’entreprise produisait de l’eau « illégale ». En effet, Nestlé enlevait tout le minerai du l’eau par un procédé chimique, puis ajoutait des sels minéraux selon une méthode brevetée.
“Nestlé a été créée ici il y a des décennies et, depuis lors, encourage l’exploitation prédatrice et même irrégulière. L’eau est un bien commun de l’humanité, la défendre est une question de souveraineté “, explique Maria. Malgré l’affirmation du président de Nestlé selon laquelle il n’y a pas de surexploitation, deux fontaines du parc se sont déjà asséchées. Selon les données officielles de l’entreprise, 19 millions de litres d’eau sont extraits chaque année. En l’absence de législation spécifique sur le marché, la compensation financière relève de la responsabilité de l’Union, de la municipalité et de l’État.
Esclavage
La région méridionale de Minas Gerais est connue pour sa grande production de café. Nestlé contrôle 22% des marques de café dans le monde, dont une grande partie est récoltée dans cette région. Les plantations conventionnelles, qui utilisent des niveaux élevés de produits chimiques, emploient des milliers de travailleurs irréguliers tous les ans. Il y a un manque de personnel pour contrôler les violations au droit du travail qui ont lieu dans les plantations de café.
Marielle vit !
Les femmes du mouvement des sans terre promettent de poursuivre leurs luttes tout au long de l’année. Maria Gomes de Oliveira est catégorique : “Tant que la bourgeoisie continuera à imposer cette rupture démocratique, condamnant la population brésilienne à la perte de ses droits, nous continuerons à occuper des terres, des entreprises et des propriétés pour dénoncer tous les protagonistes du coup d’Etat. Les gens doivent savoir qui est responsable de la misère, de l’exploitation et de la destruction de l’environnement. »
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