2024 | Bulletin d’info de mai : L’actu des organisations membres de LVC dans le monde entier

Dans la région arabe et l’Afrique du Nord (ARNA), le Comité de Coordination Internationale (CCI) de La Via Campesina s’est réuni au début du mois à Tunis, en Tunisie, pour sa première réunion en présentiel de 2024 afin de discuter des lignes d’action stratégiques du mouvement pour les 4 prochaines années. Après la réunion, la délégation du CCI de 26 pays a participé à une visite de terrain organisée par le Million de femmes rurales, une organisation membre locale, auprès des agriculteur.trices des régions de Nabil et de Marnakia, dont certains sont impliqués dans la préservation et la multiplication des semences municipales originales, une première étape importante pour parvenir à la souveraineté alimentaire. La région ARNA a également tenu sa première réunion régionale suite à sa reconnaissance en tant que 10ème région LVC par la 8ème Conférence Internationale de La Via Campesina qui s’est tenue à Bogota en décembre de l’année dernière.

Sur une note plus triste, en Palestine, alors que les bombardements de Rafah s’intensifient, Gaza a perdu toutes ses infrastructures critiques, y compris celles qui assuraient la souveraineté alimentaire et la continuité d’un sol, d’une eau et d’un air sains et propres. Les répercussions du génocide israélien vont au-delà du moment présent et au-delà de Gaza : les bombardements, la destruction et la guerre sont l’un des principaux facteurs d’accélération du réchauffement climatique et de la destruction de notre planète.

En Amérique du Sud, au Pérou, la Confédération nationale agraire du Pérou participe au processus de mise à jour de la proposition de politique nationale pour les peuples indigènes ou natifs (PNPI), un instrument multisectoriel qui donne la priorité à un ensemble d’objectifs et d’actions visant à résoudre l’exercice limité des droits collectifs des peuples indigènes ou natifs, élaboré par le ministère de la culture en collaboration avec les organisations indigènes nationales. La cinquième réunion de travail s’est tenue en mai pendant quatre jours. Ce processus comprenait la révision de la matrice des services identifiés dans cette proposition, ainsi que la validation et les engagements assumés par les ministères de chaque secteur.

Au Paraguay, la Fédération nationale des paysan.nes du Paraguay a organisé des rassemblements le 8 mai à Asunción, devant le siège du ministère des travaux publics et des communications et devant l’Institut national du développement rural et de la terre. Iels ont demandé la réparation et l’entretien des routes locales, ainsi que la légalisation et la régularisation des colonies.

En Amérique centrale, au Guatemala, le Comité pour l’unité paysanne (CUC) a dénoncé l’expulsion des familles Q’eqchi’ de la communauté Buena Vista Tzinte à El Estor, Izabal, suite aux pressions exercées par la famille Arriaza Migoya. Dans une déclaration publique, la CUC a insisté sur le fait que l’État du Guatemala est tenu de garantir les droits humains des familles q’eqchi’ et de respecter les principes de base et les lignes directrices en matière d’expulsions et de déplacements. En outre, un appel urgent a été lancé aux autorités et à la communauté internationale pour qu’elles interviennent et respectent la procédure régulière et les droits humains des familles q’eqchi’. Cette expulsion met en danger non seulement leurs maisons, mais aussi leur sécurité et leur bien-être.

Au Costa Rica, la Rencontre mésoaméricaine pour la défense du maïs a réuni des paysan.nes du Mexique, du Guatemala, du Honduras, du Salvador, du Costa Rica, du Nicaragua, de la Colombie et de l’Équateur. Face à un climat de violence généralisée et à la volonté d’assujettissement des entreprises, des gouvernements et des organisations internationales, les peuples et les communautés de la milpa ou du champ de maïs ont récupéré leur autonomie et les moyens de se gouverner. Dans une déclaration commune, iels ont rejeté l’Union pour la protection des obtentions végétales (UPOV) et les lois qui visent à réglementer qui sème, cultive, récolte et partage les semences et les variétés indigènes et créoles. Iels ont également dénoncé les accords de libre-échange, qu’iels considèrent comme des instruments de soumission de la souveraineté nationale aux intérêts des entreprises transnationales et comme des mécanismes de pression pour l’adoption de l’UPOV et de lois qui entravent l’échange et la libre utilisation des semences.

Dans les Caraïbes, en République dominicaine, du 24 au 31 mai, la VIe École continentale de femmes de la Coordination latino-américaine des organisations rurales (CLOC-Via Campesina) s’est tenue au Centre de formation et d’éducation Mama Tingo (Cefcamati) en République dominicaine. Cette VIe école continentale visait à renforcer le processus d’organisation de l’articulation des femmes de la CLOC-Via Campesina, le débat sur la construction d’un féminisme paysan et populaire, et la lutte contre toutes les formes de violence et d’oppression.

À Cuba, le 17 mai, Journée du/de la paysan.ne, on a commémoré le 65e anniversaire de la loi sur la réforme agraire et le 63e anniversaire de la fondation de l’Association nationale des petits agriculteur.ices (Anap), membre du CLOC-Via Campesina. La réforme agraire a permis à 250 000 familles paysannes de devenir propriétaires de terres, car ceux et celles qui travaillaient la terre étaient protégés par un titre foncier. En même temps, elles ont obtenu des facilités de crédit et des assurances pour leur développement économique et social.

Pendant ce temps, en Asie du Sud, au Pakistan, le 21 mai, répondant à l’appel du Pakistan Kisan Rabita Committee, les agriculteur.ices ont manifesté dans 30 districts, exigeant le début des achats de blé et des arrestations liées au scandale du blé. Iels ont demandé l’abolition des importations privées de céréales, la fixation de prix minimums pour les récoltes, la régulation des marchés, la fin des politiques néolibérales menées par le FMI et l’indemnisation des paysans touchés par les politiques gouvernementales. Iels ont également demandé que des mesures strictes soient prises à l’encontre des prêteurs usuriers.

Le 1er mai, au Sri Lanka, le Mouvement pour la réforme agraire et agricole a rassemblé de nombreuses familles de paysan.nes et de pêcheurs pour un défilé du 1er mai à Embilipitiya, dans la province du sud. L’événement, auquel de nombreuses personnes ont assisté, a mis en lumière les luttes paysannes du pays et a appelé à une prise de position collective contre l’accaparement des terres et les politiques agricoles néolibérales qui favorisent l’agriculture industrielle.

En Asie du Sud-Est et de l’Est, en Thaïlande, la Fédération des paysan.nes du Nord a publié une déclaration critiquant vivement la mort tragique de l’activiste politique Netiporn Sanesangkhom en prison, où elle menait une grève de la faim. La déclaration condamne la façon dont le régime actuel du pays utilise la loi pour réprimer l’expression publique et les libertés. “L’acte de citoyens ordinaires posant des questions ou faisant des commentaires sur la monarchie, les institutions politiques ou le processus judiciaire, dans le but de guider la société et la nation dans la bonne direction, est désormais considéré comme criminel, avec le risque de perte de vie ou de liberté”, indique la déclaration.

Au Vietnam, l’Union des paysan.nes du Viêt Nam a organisé un séminaire sur la résilience climatique grâce aux coopératives paysannes. Au cours de cet événement, iels ont présenté un modèle de riziculture agroécologique, qui met l’accent sur une meilleure gestion de l’eau, l’utilisation de bioproduits pour le traitement de la paille et une réduction progressive des intrants chimiques. Cet atelier a reçu le soutien du ministère de l’agriculture et du développement rural, ainsi que de l’Alliance des coopératives du Viêt Nam, qui encourage activement les initiatives publiques visant à modifier les pratiques agricoles. Dans le cadre de ses efforts visant à encourager davantage de paysan.nes à adopter des méthodes agroécologiques, l’union des paysan.nes a élaboré un manuel décrivant ces techniques.

En Tanzanie, environ 780 petits exploitants agricoles de MVIWATA, appartenant à 260 banques communautaires villageoises dans les districts de Njombe et de Ludewa, ont reçu une formation sur la gestion d’institutions financières créées et détenues par des agriculteur.ices. Les formations, organisées au niveau des villages, sont essentielles pour renforcer les groupes d’entraide des agriculteur.ices et sont animées par des petit.es agriculteur.ices expérimenté.es, membres de MVIWATA, qui ont été formé.es pour former d’autres petit.es agriculteur.ices. Dans d’autres régions, des formations locales à l’agroécologie sont en cours, notamment sur la fabrication de bio-pesticides et de bio-fertilisants, ainsi que des discussions sur la nature politique de l’agroécologie.

En Ouganda, l’ESAFF Ouganda a lancé en mai le bulletin “Seed Gist” pour célébrer le rôle vital que jouent les petit.es agriculteur.ices dans la préservation de la diversité du patrimoine semencier paysan. Il met en lumière les pratiques traditionnelles et les approches innovantes qui s’adaptent aux défis modernes. L’ESAFF Ouganda a également organisé des formations sur les principes, les éléments et les pratiques de l’agroécologie dans le district de Butebo et a créé une école communautaire d’agroécologie à St Marita afin de garantir des systèmes alimentaires fiables et durables.

En Afrique de l’Ouest et du Centre, au Sénégal, dans la course à la souveraineté alimentaire, les femmes prennent les devants. Les femmes du Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (CNCR) continuent de réfléchir à la manière de surmonter les barrières qui entravent l’accès à la souveraineté alimentaire dans un contexte marqué par le changement climatique. Le 22 mai, les femmes du CNCR, en partenariat avec Ipar, ont organisé une table ronde pour améliorer le travail du collège des femmes du CNCR. Cette forte mobilisation des femmes témoigne de leur engagement à être des acteurs majeurs de la lutte pour la souveraineté alimentaire. Le 20 mai, à l’occasion de la Journée mondiale de l’abeille, le CNCR s’est joint à d’autres organisations pour attirer l’attention sur l’importance des pollinisateurs, les abeilles, pour le développement durable et pour alerter sur les menaces qui pèsent sur eux.

Au Togo, du 14 au 18 mai, la Coordination Togolaise des Organisations Paysannes et de Producteurs Agricoles (CTOP) a organisé une série de réunions visant à mettre en place des comités de veille pour gérer les conflits liés aux ressources naturelles, notamment l’eau et la terre, dans les cinq communes couvertes par le projet “Mobilité Pastorale Transfrontalière Apaisée et Stabilité Sociale au Sahel” (MOPSS) au Togo.

Nous terminons ce bulletin mensuel par des nouvelles d’Europe. En France, la Confédération paysanne et la FADEAR ont exhorté les législateurs français à modifier substantiellement le projet de loi sur la souveraineté agricole en cours de discussion. Iels ont critiqué le projet de loi comme étant profondément insuffisant, contenant des dispositions dangereuses contraires à la transition agro-environnementale. Les syndicats agricoles ont demandé que la souveraineté alimentaire soit définie conformément à la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysan.nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP), que la notion de “souveraineté agricole”, qui privilégie l’énergie par rapport à l’alimentation, soit abandonnée et que des changements de politique concrets soient apportés, comme le soutien à la production de légumes. Iels ont également demandé des objectifs légaux pour maintenir au moins 400 000 fermes et 600 000 agriculteur.ices afin de préserver le modèle de l’exploitation familiale, d’assurer le pluralisme dans les chambres d’agriculture et de garantir les revenus des agriculteur.ices et un accès équitable à la terre.

Au Royaume-Uni, à l’approche des prochaines élections générales, l’Alliance des travailleur.euses de la terre (Land Workers Alliance) demande une augmentation du financement de l’agriculture dans tout le pays. Le syndicat a lancé une pétition demandant le doublement des budgets agricoles, qui représentent actuellement 0,4 % des dépenses publiques. Il estime qu’un soutien financier accru est indispensable pour assurer la transition vers des pratiques durables, récompenser les leaders écologiques, investir dans les systèmes alimentaires locaux et former une nouvelle main-d’œuvre agroécologique.

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4Si nous avons manqué des mises à jour importantes, veuillez envoyer les liens à communications@viacampesina.org afin que nous puissions les inclure dans la prochaine édition. Nous n’incluons que les mises à jour des membres de La Via Campesina. Pour une mise à jour complète des différentes initiatives de mai 2024, veuillez consulter notre site web. Vous pouvez également trouver les éditions précédentes de notre bulletin d’information sur notre site web. En outre, des versions condensées de notre bulletin d’information sont disponibles en podcast sur Spotify.

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