Brésil : Le MST marque la Journée Internationale des Luttes Paysannes avec plus de 50 manifestations à travers le pays

Chaque année, au mois d’avril, le Mouvement des Travailleurs Sans Terre (MST) du Brésil mobilise des milliers de personnes à travers tout le pays pour réclamer la justice foncière, la souveraineté alimentaire et la réforme agraire. Leurs efforts s’articulent autour de la Journée nationale de lutte pour la défense de la réforme agraire, célébrée chaque année tout au long du mois, et alignée avec la Journée internationale des luttes paysannes, le 17 avril.
Cette année, entre le 1er et le 17 avril, plus de 50 000 personnes ont pris part à 55 actions coordonnées à travers le pays — marches, rassemblements, occupations et événements de solidarité — sous le slogan « Occupons pour nourrir le Brésil ».

Les manifestations ont touché 47 municipalités dans 20 états, y compris des régions majeures du Nord, du Nord-Est, du Centre-Ouest, du Sud-Est et du Sud. Les militant·e·s du District Fédéral (où se trouve Brasília, la capitale) ont également participé aux actions régionales. Et le mouvement continue de prendre de l’ampleur, avec d’autres mobilisations attendues d’ici la fin du mois.
Jusqu’à présent, le MST a réalisé 28 occupations de terres, lancé deux nouveaux camps ruraux et occupé cinq bâtiments gouvernementaux liés au Ministère du Développement Agraire du Brésil. L’objectif ? Faire pression sur le gouvernement pour qu’il exproprie les terres inactives et non productives et réinstalle des milliers de familles sans terre—un besoin urgent dans un pays avec l’une des structures de propriété foncière les plus inégales du monde.
Le 17 avril revêt une grande signification symbolique pour le mouvement. Il commémore le massacre d’Eldorado do Carajás, où 21 travailleurs sans terre ont été tués par la police militaire en 1996 lors d’une manifestation pacifique pour les droits fonciers dans l’État du Pará. Cet événement reste l’un des actes de répression les plus brutaux soutenus par l’État dans l’histoire récente du Brésil.
Pablo Neri, un leader du MST dans l’État du Pará, déclare :
« Pendant 29 ans, cette terre—Curva do S dans l’Amazonie—porte la mémoire de nos camarades assassinés·es. C’est là où la poésie, la musique et la protestation se sont mêlées aux cris de justice. La marche interrompue à Eldorado a exposé la brutalité des élites, mais a aussi montré la puissance des personnes organisées. Les camps de jeunesse, les conférences universitaires et les occupations dans le Pará entretiennent cette mémoire vivante. »
Aujourd’hui, le MST pousse le gouvernement à agir sur la réforme agraire promise depuis longtemps et à fournir des terres aux 145 000 familles vivant encore dans des camps de fortune. Le mouvement insiste sur le fait que l’agriculture à petite échelle et une répartition équitable des terres sont essentielles pour résoudre la crise alimentaire persistante du Brésil. Malgré les récentes initiatives politiques, plus de 21 millions de ménages brésiliens vivent encore en insécurité alimentaire.

Réforme agraire et mobilisation populaire : essentielles à la démocratie
Bien que le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva soit revenu au pouvoir avec des promesses de réforme agraire, moins de 5 000 familles du MST ont été réinstallées à ce jour, et de nombreux processus restent incomplets.
Ceres Hadich, coordinatrice nationale du MST, souligne que ces manifestations ne sont pas seulement symboliques, mais qu’elles exercent une pression politique nécessaire :
« Des dizaines de milliers de familles ont attendu des décennies pour obtenir des terres. Le gouvernement doit accélérer le processus. Nos actions collectives poussent les négociations en avant – et nous commençons à voir des progrès. »
Le président Lula devrait effectuer deux visites clés en avril : l’une dans l’État du Pará (le 25 avril) et l’autre dans le Paraná (le 30 avril), pour annoncer de nouvelles mesures relatives à la réforme agraire. Selon Hadich, les actions nationales de mars pour la Journée des femmes sans terre et les mobilisations d’avril en cours ont permis d’obtenir des gains concrets.
« Ces visites sont le résultat d’une pression croissante et de l’organisation des bases », dit-elle. « Elles montrent que le président est à l’écoute. Mais plus encore, elles démontrent à quel point la mobilisation populaire est essentielle, non seulement pour faire avancer les réformes, mais aussi pour défendre la démocratie elle-même. »
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