2025 | Bulletin d’info de février : L’actu des organisations membres de LVC dans le monde

En février, les organisations membres de La Via Campesina se sont mobilisées dans le monde entier contre les injustices systémiques et les crises de plus en plus graves qui touchent les communautés rurales. De l’accaparement des terres et de l’exploitation des entreprises à la destruction de l’environnement et à la répression, les paysan.nes et les producteur·ices de denrées alimentaires continuent de résister et de se mobiliser contre le contrôle croissant des multinationales sur l’agriculture et les systèmes alimentaires. Ces mobilisations ont dénoncé la montée des politiques de droite, exigé la souveraineté alimentaire et demandé la mise en œuvre de La Déclaration des Nations unies sur les droits des paysan.nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales UNDROP comme outil pour garantir la justice et la dignité de ceux et celles qui nourrissent le monde.
A l’approche de la Journée internationale des luttes pour les droits des femmes, le 8 mars, La Via Campesina appelle tous ses membres et allié.es à s’unir dans une action antifasciste sous le slogan : « En défense de nos droits et de la souveraineté alimentaire, unies contre le fascisme, la violence et la faim ! »
Nous vous invitons à rejoindre et à soutenir les actions mondiales des femmes paysannes dans le cadre du 8M25 et à découvrir des actions dans le monde entier sur le Padlet. Ensemble, nous poursuivons la lutte pour la justice et les droits de ceux et celles qui nourrissent le monde.
Commençons par des nouvelles d’Asie (Sud et SEEA) :
Au Pakistan, des milliers d’agriculteur.ices se sont rassemblé.es à Bhit Shah, dans le Sindh, pour protester contre les initiatives des entreprises agricoles et les projets de canaux sur l’Indus. Le Pakistan Kisan Rabita Committee (PKRC) rapporte que l’initiative “Green Pakistan” est une couverture pour la corporatisation de l’agriculture et son initiative anti-agriculteur.ices. Il exige la redistribution des terres, s’oppose aux taxes agricoles et préconise plutôt de taxer les riches. Les dirigeant.es ont également accusé le gouvernement de se plier aux exigences du FMI, de vendre les ressources nationales et de céder des terres à des investisseur.euses étranger.ères ou à des projets de militarisation.
Au Sri Lanka, MONLAR mène une campagne pour mettre en lumière l’augmentation de la dette rurale et les rôles douteux joués par les sociétés de microfinance – réglementées ou non – qui prêtent à des taux exorbitants, enfermant les ménages, en particulier les femmes, dans un cycle d’endettement. Le mouvement a également attiré l’attention sur le harcèlement dont sont victimes les femmes de la part des prêteur-euses privé.es et de leurs agent.es de recouvrement. En février, iels ont célébré le troisième anniversaire du Chandanapolkuna Rural Women’s Collective, une initiative visant à mettre en place un modèle d’assistance économique solidaire qui promeut l’épargne, les pratiques agricoles traditionnelles, l’élevage, les industries domestiques et l’agriculture écologique.
En Corée du Sud, les syndicats paysans s’alarment des tentatives de répression à l’encontre des manifestant.es paysan.nes et des étudiant.es qui ont participé au rassemblement contre la loi martiale, qui a suscité une forte pression publique et conduit à l’arrestation de l’ancien président. La Ligue des paysans coréens (KPL) a tenu une conférence de presse le 19 février pour souligner la criminalisation des personnes ayant participé à la manifestation de Namtaeryeong (pour en savoir plus, voir notre rapport de décembre 2024). La KPL rapporte que la police considère la manifestation de Namtaeryeong comme illégale, citant des violations des lois sur le rassemblement, l’obstruction et les dommages matériels. Iels mettent en garde contre l’influence croissante de la droite, notant que 38% des personnes interrogées croient à la fraude électorale, 41% soutiennent la réélection du gouvernement et l’opposition à la destitution s’accroît.



En Afrique, au Kenya, la Haute Cour a levé l’année dernière l’interdiction des OGM. À la suite de cette décision de la Haute Cour, la Ligue des paysans et paysannes du Kenya a demandé à la Cour d’appel du Kenya de maintenir l’interdiction des OGM. La Cour devrait se prononcer le 7 mars sur la question de savoir si la KPL se verra accorder une injonction contre le déploiement d’aliments génétiquement modifiés et d’aliments pour animaux dans le pays. La KPL continue à se mobiliser contre les OGM et à promouvoir les semences locales conservées dans le pays.
L’ESAFF Ouganda mobilise ses membres pour qu’iels contactent les membres locaux du parlement afin de soutenir et d’encourager la domestication de La Déclaration des Nations unies sur les droits des paysan.nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales ( UNDROP )en Ouganda. L’organisation estime que la déclaration est un instrument stratégique de justice qui exige que le gouvernement respecte, préserve et réalise les droits des paysans et paysannes et qu’il réglemente les sociétés transnationales afin d’éviter tout préjudice. L’UNDROP facilite la mise en place d’un système alimentaire juste et durable qui promeut la biodiversité et met en évidence les droits humains essentiels que les États devraient respecter.
Au Mali, du 5 au 7 février, le CNOP forme son Collège des femmes aux politiques agraires, aux cadres juridiques et aux actions de plaidoyer pour la promotion d’une politique agroécologique. Cette formation s’inscrit dans le cadre de la mobilisation des mouvements paysans et paysannes et sociaux, notamment au Mali, où la Convergence malienne contre l’accaparement des terres (CMAT), composée de cinq organisations (AOPP, CAD-Mali, CNOP-Mali, LJDH, UACDDDD), s’est mobilisée pour faire respecter et sécuriser les droits fonciers coutumiers des communautés.
Au Sénégal, le CNCR a apporté une solution concrète aux difficultés rencontrées par les femmes de Kabiline 2, dans le département de Bignona, en installant un système solaire complet comprenant des panneaux solaires, une pompe à eau, un réservoir et un bassin. Il y a moins de deux ans, ces femmes étaient confrontées à la pénurie d’eau, ce qui rendait leurs activités de maraîchage extrêmement difficiles. Aujourd’hui, grâce à cette initiative, elles ont un accès durable à l’eau, ce qui renforce leur résilience et leur autonomie dans la production de légumes.
Pendant ce temps, dans la région arabe et Afrique du Nord (ARNA), l’Union des comités de travail agricole (UAWC) en Palestine, dans le cadre de son engagement à soutenir les droits des pêcheur.euses, à renforcer leur résilience et à assurer leur retour aux activités de pêche, a effectué une visite sur le terrain dans le port de Gaza afin d’évaluer les dommages et les pertes graves subis par le secteur de la pêche et de mettre en œuvre des mécanismes de soutien efficaces en réponse aux défis allant de la destruction des bateaux et de l’équipement aux restrictions d’accès à la mer. L’équipe de l’UAWC a également identifié les besoins urgents de réhabilitation du secteur maritime, qui constitue un moyen de subsistance pour de nombreuses familles.
Pour la Tunisie, en réponse à l’escalade des crises mondiales alimentées par le système capitaliste et à leurs impacts locaux et régionaux, l’Association Million de femmes rurales et de sans-terre a organisé un atelier de planification stratégique dans la capitale Tunis. L’atelier visait à renforcer la résistance collective et à définir un plan d’action sur trois ans. En mettant l’accent sur la souveraineté alimentaire, l’agroécologie et la justice climatique, l’association cherche à défendre les communautés rurales et à promouvoir la justice sociale, économique et environnementale. Des stratégies concrètes ancrées dans les réalités paysannes ont également été établies pour une mise en œuvre immédiate.
En Europe, le mois de février a été très tendu pour les paysan.nes européen.nes, qui ont vu leur droit aux semences menacé. Le Parlement européen est à la dernière phase du débat sur une proposition visant à déréglementer l’entrée de nouveaux OGM dans les pays membres de l’UE. Malgré leurs dénonciations incessantes, l’ECVC et les organisations sociales alliées ont continué à souligner les innombrables pertes et impacts que cela aurait sur la souveraineté alimentaire de l’Europe, ainsi que la pression que les paysan.nes subiraient de la part des sociétés transnationales qui contrôlent le marché mondial des semences.
La Coordination nationale agraire (CNA) du Portugal a célébré son 47e anniversaire en réunissant des dirigeant.es et des militant.es paysan.nes européen.nes afin de souligner l’importance des droits des paysans et paysannes pour la souveraineté alimentaire et l’agriculture familiale sur l’ensemble du continent. Grâce à cet événement, l’organisation portugaise, qui représente les petit.es et moyen.nes agriculteur.ices familiaux, a contribué aux mobilisations précédant le prochain Forum mondial de Nyéléni, en encourageant l’intérêt pour l’avancement de la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysan.nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.

Aux États-Unis, la Family Farm Coalition s’est réunie les 26 et 27 février, rassemblant des représentants de sa coalition de 30 organisations dirigées par des paysan.nes pour rencontrer plus de 40 législateur.ices et membres du personnel législatif. Iels ont exigé une action urgente sur les politiques qui donnent la priorité aux personnes plutôt qu’aux profits, exhortant les législateur.ices à soutenir Main Street plutôt que Wall Street et à renforcer les communautés rurales. Dans le même temps, iels ont appelé à un plus grand soutien des producteur.ices alimentaires indépendant.es.
Au Canada, le Syndicat national des paysan.nes a averti que les changements de politique des États-Unis perturbent le commerce et menacent les paysan.nes et les travailleur.euses canadien.nes. Il a exhorté le Canada à élaborer une stratégie alimentaire et agricole à long terme afin de réduire sa dépendance à l’égard des États-Unis, affirmant que l’approche de Trump rend les accords commerciaux peu fiables. Le renforcement de la souveraineté alimentaire, ont-iels fait valoir, protégerait contre les perturbations de la chaîne d’approvisionnement, les pertes de revenus et les pénuries alimentaires.
Au cours des deuxième et troisième semaines de février, l’Organización Boricuá de Agricultura Ecológica de Porto Rico a accueilli un échange avec le Black Dirt Farm Collective de la région Mid-Atlantic de l’Amérique du Nord. Reliées par La Vía Campesina depuis plus de 12 ans, ces organisations ont tissé de solides liens de solidarité. Elles ont dirigé des brigades internationales pour la justice climatique, reconstruisant des maisons, des infrastructures agricoles et des plantations à Borikén et dans d’autres îles des Caraïbes après le passage d’ouragans tels qu’Irma et María. Cette fois-ci, l’échange comprenait des activités pour tous les âges et s’est terminé à la Finca Pueblo Nuevo, qui fait partie du réseau agroécologique de l’Organización Boricuá, où le partage des connaissances et les repas préparés à la ferme ont rassemblé la communauté.



En République dominicaine, l’Instituto Agroecológico Latinoamericano Florinda Soriano Muñoz a organisé un échange pratique utilisant la méthodologie “de paysan à paysan” dans le cadre du processus de remise des diplômes de sa première cohorte, qui a débuté en 2022. Des étudiant.es, des animateur.ices, des producteur.ices de la communauté et un spécialiste de la Faculté des sciences agricoles et vétérinaires y ont participé. L’échange s’est concentré sur le partage d’expériences de fermes agroécologiques et l’engagement avec des alliés sur la gestion du bétail, ainsi que sur la recherche et l’expérimentation agricoles.




Au Guatemala, le 26 février a marqué les 26 ans du rapport de la Commission de clarification historique sur le génocide, la torture et les déplacements de population. CONAVIGUA a condamné le fait que le gouvernement privilégie les demandes des anciens militaires au détriment des droits des victimes, la montée de la violence et l’impunité pour les violations des droits humains. Elle a exhorté le ministère de l’éducation à inclure le rapport dans le programme d’études national.



Au Salvador, la Fédération des coopératives pour la réforme agraire de la région centrale (FECORACEN) a mené un programme de formation avec des jeunes paysan.nes, axé sur la défense de l’environnement, de l’eau et du territoire. Grâce à des cercles territoriaux réunissant des représentant.es de 14 collectifs de jeunes à La Libertad, ces espaces ont permis aux jeunes d’identifier leurs besoins, leurs défis organisationnels et de planifier leurs activités futures.
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En Colombie, les organisations paysannes, ainsi que les communautés indigènes, noires, afro-descendantes, raizal et palenquero, ont conclu le Pacte pour la terre, l’eau, le territoire, l’environnement et la vie. Cet accord historique vise à jeter les bases du plan décennal de réforme agraire, en promouvant la distribution équitable des terres, la justice sociale et la paix dans les zones rurales. Le pacte comprend 12 points clés, allant de la redistribution des terres à la protection de l’eau en passant par la réorganisation des institutions agraires. Environ 2 800 dirigeant.es de diverses organisations ont participé à 25 groupes de travail, partageant leurs connaissances pour renforcer les efforts ruraux et améliorer le niveau de vie de leurs familles.
En Équateur, le coordinateur national des paysan.nes “Eloy Alfaro” a critiqué le mauvais gouvernement de Daniel Noboa, qui a aggravé la crise économique, sociale et sécuritaire. Iels ont décidé de soutenir un candidat progressiste au second tour des élections, en mettant l’accent sur la souveraineté alimentaire et les droits des paysan.nes. L’organisation a souligné la violence dans les zones rurales de la part de groupes liés à l’agro-industrie et aux économies criminelles, qui utilisent l’extorsion et les achats coercitifs pour concentrer la terre et l’eau, sapant ainsi la production et la souveraineté alimentaires.
C’est ainsi que nous concluons l’édition de ce mois. Si vous avez des informations importantes à ajouter, n’hésitez pas à nous envoyer les liens à communications@viacampesina.org afin que nous puissions les inclure dans la prochaine édition. Ce bulletin ne reprend que les mises à jour des membres de La Via Campesina. Vous pouvez également retrouver les éditions précédentes sur notre site web ainsi que des versions condensées en podcast sur Spotify.
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